Un hôtel emblématique du XIXème : l’hôtel de l’Union
Dès 1815 avec la fin de l’empire les visiteurs se font de plus en plus nombreux et le foires connaissent un succès grandissant. La commune de Chamonix déplore qu’il n’y est que 3 hôtels et 5 cabarets et incite l’État à autoriser la construction d’hôtels.
C’’est ainsi qu’en 1816 les frères Charlet (fils du notaire Charlet) associés à Mr Simond (propriétaires de l’hôtel du Nord) font appel à un architecte genevois Mr Sismondi et ouvrent un magnifique et grand hôtel en plein centre de Chamonix, une révolution à l’époque car imposant par sa taille, son architecture originale avec son fameux balcon à portiques.
L’hôtel de l’Union fait fort impression et les voyageurs de l’époque sont très étonnés de son confort « on y trouve même les journaux de tous les pays, une boutique naturaliste, ainsi que les meilleurs vins ! … En 1824 « le guide du voyageur en Suisse » signé par Mr Richard, met l’accent « sur les bains de santé et de propreté » Ces bains situés près de l’Arve sont à l’image de cette nouvelle idée qui fleurit à Chamonix de créer une station « climatérique ». Les bains, nouveautés du XIXème siècle, sont encore rares hormis les stations thermales. Les frères Charlet, propriétaires des terrains des Mouilles où coule une source sulfureuse ont l’idée d’apporter dès les années 1825 cette eau bienfaisante à l’hôtel puis en 1834 directement par des canalisations de bois, qui seront emportées plusieurs fois par les crues de l’Arve.
Nombreux sont les visiteurs de marque qui prennent pension à l’Union.
John Ruskin dès son 1er séjour avec ses parents en 1833 puis ensuit lors de ses voyages solitaires y séjournera régulièrement. On apprend ainsi que « vingt-deux personnes y sont attachées, que l’on y est parfaitement servi, les chambres sont bien tenues, qu’il y a des salles à manger à chaque étage, que l’on propose des diners de table d’hôte à 1,5, et 9 heures mais que l’on peut aussi se faire servir des repas chez soi à l’heure qu’il convient qu’il y a une salle de billard, des journaux français, des sommeliers parlant plusieurs langues…
En 1836 y descendent Georges Sand et ses deux enfants, Franz Litz, et Marie d’Agoult. Henriette d’Angeville en 1838 séjourne dan cet hôtel qu’elle trouve particulièrement confortable.
L’hôtel connaît une nouvelle dynamique avec l’arrivée de Mr Eisenkrammer. 1er sommelier de l’hôtel qui loue dès 1838 l’Union à son patron et qu’il achète finalement en 1844. Il épouse ensuite Marie Henriette Simond (nièce de Mme Coutterand et fille de son ancien patron). Monsieur Ferdinand, comme l’appelaient les chamoniards, est ambitieux, il organise au départ de Genève des convois spéciaux pour acheminer les provisions indispensables à son hôtel, et fait du « lobbying » auprès de visiteurs arrivant à Genève pour les convaincre de loger dans son hôtel à Chamonix. En 1848 il construit un nouvel hôtel le Royal (aujourd’hui le casino).
En 1860 lors du voyage Napoléon III le maréchal des Logis cherche le meilleur établissement pouvant recevoir l’empereur et sa cour. Son choix se porte sur ce nouvel hôtel. Le ministère est effaré par les tarifs proposés mais Mr EisenKrammer n’en démord pas si bien que l’empereur ne résidera qu’une seule nuit à Chamonix malgré le désir de l’impératrice!
Les deux hôtels sont proposés sous le nom Hôtel Royal et de l’Union. Mr Ferdinand a quelques démêlées avec les guides en raison de son refus de passer par le bureau de la Compagnie pour proposer les guides de son choix sans passer par le tour de rôle.
Mais l’hôtel connaît toujours un réel succès. Théophile Gauthier en 1862 l’apprécie particulièrement : « l’hôtel de l’Union est grand et magnifique, tenu à la manière des hôtels d’Allemagne de première classe avec toutes les recherches du confortable moderne. On nous y servit dans une salle immense un excellent déjeuner ». Il envisage de créer une grande station thermale mais il peine à convaincre la commune. Il crée dans les années 1862 une société intitulée « les hôtels de Chamonix » société qui rassemble plusieurs hôtels de Chamonix mais celle-ci ne s’impose pas et finalement est rachetée par deux banquiers .
Dès lors Mr Eisenkrammer disparait et l’hôtel passe de main en main. On voit ainsi un grand nombre de propriétaires se succéder d’où des appellations différentes pour l’hôtel jusque en 1897 ou Mr Felisaz le rachète. Il entreprend des travaux d’agrandissement, crée un restaurant dans les jardins dont la façade est ornée de cariatides. L’hôtel reconnait de belles heures d’activité.
A la mort de Mr Félisaz les héritiers peinent à faire fonctionner l’hôtel.
En 1929 la commune désirant ouvrir une belle place au centre de Chamonix finit par exproprier les propriétaires.
L’hôtel est détruit en 1930 laissant place à la construction de l’hôtel des Postes en bordure d’Arve et ouvrant ainsi une place plus aérée en centre-ville.
Sources :
Archives association des Amis du Vieux Chamonix – Thèse : Isabelle Madesclaire- Voyages de deux amis en Italie par le Midi de la France et retour par la Suisse de Richard et Achille Lheureux en 1829. – L.Simond, Voyage En Suisse. – CH Vallot : guide de Chamonix – André Hélard : John Ruskin et les cathédrales de la terre.- Christine Boymond Lasserre et Joëlle Dartigue Paccalet : 1860 . La vallée de Chamonix et l’Annexion. – Marc Sandoz : Auberges d’autrefois. Revue savoisienne – Rodolphe Topffer : voyage autour du mont Blanc – Paul Payot : Au royaume du mont Blanc
Sources :
Thèse : isabelle Madesclaire
Voyages de deux amis en Italie par le Midi de la France et retour par la Suisse de Richard et Achille Lheureux en 1829.
L.Simond, Voyage En Suisse
CH Vallot : guide de Chamonix
André Hélard : John Ruskin et les cathédrales de la terre.
Christine Boymond Lasserre et Joëlle Dartigue Paccalet : 1860 . La vallée de Chamonix et l’Annexion.
Mar Sandoz : Auberges d’autrefois. Revue savoisienne
Rodolphe Topffer : voyage autour du mont Blanc
Paul Payot : royaume du mont Blanc