Un alpage de petite montagne ou « mointieu » : Charousse
En cette période de confinement puis de dé confinement, Charousse reste un des lieux les plus chers aux habitants de la vallée. Pour le promeneur, Charousse au pied du massif du Mont Blanc est un lieu magique. Ici On bascule dans le temps, on s’imprègne de cette atmosphère de sérénité sur ce léger plateau protégé par la forêt, où l’homme a bâti ces «chalets».
Possession depuis plusieurs siècles de familles de Vaudagne, les fermes sont rachetées durant l’entre deux guerres par l’architecte Albert Laprade qui, séduit par cette clairière et passionné de culture rurale, engage une grande partie de sa fortune à leur entretien et à leur conservation.
Merci Mr Laprade !
Charousse nous raconte la vie rude de ces paysans lorsque, à la mi-saison, six familles quittaient leurs fermes de Vaudagne en début d’été pour venir loger ici avec leur troupeau pendant un mois ou deux. C’était ce que l’on appelait la «remue». Quand l’herbe ne suffisait plus, chacun envoyait ses vaches au troupeau communautaire, plus haut encore dans les pâturages supérieurs appelés « la grande montagne ».
Charousse était une estive dite de «petite montagne» ou «montagnette» ou encore « mointieux ». C’est-à-dire de transition entre la vie au village et la montée en alpage supérieur. Cette « montagnette » comprenait six chalets, dont cinq datant du XVIIIe, le tout dans une belle unité architecturale propre aux temps anciens. Ils sont un témoignage unique dans notre vallée de ces temps révolus. L’ensemble architectural de Charousse est remarquable. Authentique, il nous éclaire sur l‘art de la construction rurale qui traduit ce savoir vivre en commun avec les bêtes. La cohabitation hommes-animaux était une nécessité vitale. C’était le principe de base de l’habitat traditionnel dans la vallée de Chamonix.. Le séjour étant temporaire, l’aménagement restait rudimentaire.Les chalets ont tous été édifiés selon un plan commun.
Une partie supérieure en bois abritait la grange, une partie inférieure édifiée en pierres où logeaient les familles et les bêtes divisée en deux sections distinctes.. Dans la partie occupée par l’homme se trouvaient, une ou deux pièces dont la cuisine, appelée « outa » la pièce à tout faire . C’est ici que le foyer s’ouvrait sur une grande hotte pyramidale traversant la grange. Dans cette large cheminée appelée « bouerne » on faisait fumer les salaisons. Tout à côté, le « pèle » servait de pièce commune à l’ensemble de la famille.. Les animaux occupaient l’autre section maçonnée tournée vers l’aval. Cet espace communiquait avec l’extérieur par une porte mais était aussi toujours accessible depuis l’outa.Il est à noter la solidité de la charpente des granges. Elle devait résister aux tonnes de neige qui la recouvraient en hiver. Ces fermes ont quasiment toutes conservé une « cort’na », auvent clos sur trois côtés donnant accès à l’habitation, à l’écurie et à la grange.
Cet ancien alpage a évidement a perdu le son et l’écho des clarines qui, dans les temps anciens, y résonnaient. On doit à Mr Laprade et à ses successeurs d’avoir su préserver ce bel ensemble. Que serait il devenu sans eux ?
Sources : archives de l’ « Association dans l’temps » des Houches – De nombreuses et enrichissantes discussions avec Mme Barré fille de Mr Laprade dont je garde un très joli souvenir. Avec un grand merci à tous les membres de la famille qui m’ont toujours très bien accueillie.