Le beau « Muck »
Les anciens à Chamonix se souviennent encore du « Beau Muck ».
Personnage marquant de la période de l’entre deux guerres, «Muck » était de toutes les fêtes, de toutes les rencontres. Nombreux sont les chamoniards qui en parlent encore avec humour et tendresse.
Henry Mückenbrünn, surnommé « Muck », arrive à Chamonix en 1924 avec l’équipe polonaise de ski pour participer aux J.O. Les polonais disent qu’il est venu à Chamonix seulement en 1926.
A Zakopane, son pays d’origine, dans les montagnes des Tatras, il est la gloire nationale. 7 fois champion de ski, 2 fois détenteur du record de saut à ski , il est la star de l’équipe. Très apprécié de ses compatriotes, il a laissé, encore de nos jours, un souvenir ému dans son village d’origine,
Cependant il ne retournera à Zakopane qu’une seule fois : en 1933 .Là il participera en tant que juif polonais à des jeux appelés « les maccabiades » les premiers jeux hiver juifs. Ces jeux avaient été troublés par la jeunesse anti sémite polonaise. Est ce pour cette raison qu’il ne retournera plus jamais dans son pays natal ? Nul ne le sait
Excellent skieur, excellent sauteur, il se lance dans la compétition, connaissant un vif succès. Mais i l faut gagner sa vie, or on ne s’enrichit pas avec des médailles et très vite il entreprend de donner des cours.
Il co écrit avec le doctuer Hallberg un livre sur les techniques de ski, sur le matériel de ski mais aussi sur les exercices à faire pour se préparer à ce sport exigent.
Beau parleur, belle carrure, il séduit immédiatement la clientèle aisée venant à Chamonix. Il comprend tout l’intérêt de s’occuper avec attention de ces dames un peu « inaptes» sur leurs skis. Enlacées par cet homme vigoureux qui les emmène sur les pentes enneigées, elles se laissent griser par la vitesse… C’est fantastique ! D’autant que cet homme, au léger accent slave, danse la valse à merveille. Dans les salons de l’hôtel des Alpes ou du Majestic, les jeunes chamoniardes et les belles «demoiselles» rivalisent pour essayer de se retrouver dans ses bras le temps d’une danse.
Habile commerçant, il est le meilleur de l’époque, vendant, revendant ce matériel de ski toujours de plus en plus perfectionné. Ce beau skieur et ce séduisant moniteur est forcément de bon conseil… Profitant de leur naïveté, « Muck » abuse « un peu » … Mais c’est fait avec un tel charme !
Slave, c’est aussi un grand romantique … Il tombe fou amoureux de Madeleine, jeune mannequin venue présenter au col de Voza des collections de mode.
Pour elle, il devient architecte, décorateur et il construit un des plus beaux chalets des Pècles. A l’intérieur, tout est sculpté de ses mains (ou presque) : portes, meubles, placards , plafonds. Le résultat est magnifique ! Il a un talent incroyable, issu de ses racines polonaises. A Zakopane encore de nos jours le travail du bois est remarquable.
Mais la guerre arrive avec son lot de désespérances. Le beau Muck est juif polonais et fait des envieux . Dénoncé, il est arrêté par la milice, il s’enfuit et se cache dans la région d’Annecy..
Ses activités reprennent après la guerre, mais on n’est plus dans la période des années folles ! Il vend son beau chalet et trafique un peu. Le moniteur n’est plus aussi fringuant, d’autres ont pris le relais.
Il connaîtra une fin tragique en avril 1956, emmenant avec lui dans la mort une des plus belles personnalités de Chamonix, le guide Paul Demarchi.