Grotte naturelle ou grotte artificielle au glacier des Bois ?
Dès la fin du 18ème siècle, les premiers visiteurs venus à Chamonix avaient pour habitude d’aller découvrir la grotte naturelle formée au niveau de la langue terminale du glacier des Bois et par laquelle jaillissait la source de l’Arveyron.
Le site était particulièrement impressionnant en raison du vacarme provoqué par l’eau qui s’en échappait.
Mr Martel venu en 1742 (qui donna le premier le nom de « Mont Blanc » à ces monts affreux) découvre cette grotte dont parlent ses guides, elle a alors 26 mètres de haut.
Plus tard, le genevois Marc Théodore Bourrit, lors de ses nombreux voyages à Chamonix (entre 1760 et 1790), aimait beaucoup emmener des visiteurs à la découverte de ce lieu « magique ».
…Que vous dirai-je des sources de l’Arveyron ? Rien, assurément qui puisse vous donner l’idée de cette merveille… Imaginez un portique immense en forme de cintre, l’Arveyron sortant en bouillonnant au fond de cette voûte de glace que le soleil embellissait de toutes les couleurs de l’arc en ciel. Des quartiers de rochers, des masses énormes de glaces détachées, environnant cette redoutable enceinte et semblant en défendre l’entrée. Nous pénétrâmes à travers ces débris mais l’Arveyron empêche que l’on puisse pénétrer plus savant. Nous en vîmes assez pour juger de l’enfoncement prodigieux de la voûte et de la beauté de la glace….Cette voûte tombe, s’écroule, en éclats, chaque année et se ferme, puis reparaît à la fonte des neiges… »
Horace Bénédicte de Saussure, ce naturaliste genevois qui fit la 3ème ascension du Mont Blanc, en parle comme une excursion facile. Par lui on apprend que l’on met une heure pour s’y rendre mais il précise qu’il peut y a voir un certain danger, souvent des blocs de glace s’effondrent…
En 1800 elle mesure 32m de haut. En 1816 elle reçoit la visite des poètes romantiques qu’étaient Byron et Shelley.
La langue glacière à cette époque arrivait au niveau du pas de tir récemment aménagé.
Cependant, en Suisse, à Grindelwald, sur le glacier inférieur, une grotte artificielle est réalisée dès 1861. Cette idée germa à Chamonix. Un «étranger » propose d’en creuser une au glacier des Bois. L’autorisation lui fut refusée par la mairie mais une année plus tard une concession est donnée aux guides Jean Marie et Michel Couttet. Le projet aboutit durant l’été 1863. On creuse une galerie de 26 m qui conduit à une rotonde. A côté existait une crèmerie appelée « Au Touriste ».
Ce fut la première grotte artificielle de Chamonix.
Photos de la grotte à découvrir dans l’ouvrage de Rémi Fontaine « Chamonix et es glaciers. les premières images ».Page 122 et 123
En 1868, Théophile Gauthier passe quelques jours à Chamonix. Dans son livre Vacances du Lundi il écrit :
On arrive en serpentant à travers des blocs de rochers en désordre, de flaques d’eau sur lesquelles sont posées des planches …Un guide qui se tient dans un petit chalet décoré de photographies, nous mena voir, un peu malgré nous, la curiosité qu’il exploite. On paye cinquante centimes par personne. Ce n’est pas cher sans doute mais cela vous détourne de votre but. C’est une sorte de cave d’azur, un trou dans le flanc du glacier, que nous soupçonnons fort d’avoir été élargi et régularisé de main d’homme. A l‘entrée le jour pénétrant l’arcade de glace produit un effet assez magique. On avance suivant dans la boue une planche étroite et protégé par un parapluie de coton contre les gouttelettes qui tombent de la voûte avec un tintement sonore. Quelques chandelles grésillantes, placées de loin en loin, jouent de leur les feux de Bengale et tâchent inutilement de donner à cette caverne humide un aspect féerique. On revient sur ses pas et l’on se trouve avec plaisir hors de cette atmosphère moite et glaciale.
Le tour est fait et vous êtes libre d’aller admirer à quelques pas la grande arche de cristal par laquelle l’Arveyron sort en bouillonnant du glacier impatient de se produire à la lumière après avoir si longtemps cheminé …
1867 voit le renouvellement du bail.
En 1869 Venance Payot évoque une galerie de 100 mètres de long difficile à réaliser. Ensuite il n’y aura plus de grotte artificielle. La grotte naturelle disparaîtra elle aussi…
La grotte du glacier des Bossons creusée vers 1865, facile d’accès devient la grotte la plus connue de la vallée.
On oubliera définitivement la grotte du glacier des Bois