A l’entrée du Parc Couttet, côté parking des Allobroges, tout près de la Maison des Artistes se dresse depuis quelque temps une imposante stèle de granit.
À l’origine, celle-ci se trouvait dans le jardin de l’hôtel Couttet, en contrebas de la tourelle ,( établissement construit en 1867 par le guide François Couttet pour y accueillir ses amis alpinistes). Le temps passant la stèle fut oubliée et, l’hôtel perdant de son panache, celle ci était noyée parmi les ronces et les herbes hautes et son inscription devenait illisible.
Grâce à l’action de l’Alpine Club et de la ville de Chamonix la stèle retrouve vie.
Mais qu’est ce donc que cette imposante pierre de granit et qui est Charles Edward Mathews?
Ce magnifique morceau de granit est érigé à la mémoire de Charles Edward Mathews (1834-1905),cinquième président de l’Alpine Club et 1er Président du Climbers’ Club . Charles Edward Matthews œuvra avec son frère en 1857 à la fondation de l’Alpine Club dont il fut le président de 1878 à 1880. Grand ami de Leslie Stephen et de Whymper, il arpenta pendant plus de 40 ans les Alpes en réalisant discrètement quelques premières. Toute sa vie, il fut un passionné du mont Blanc puisqu’ il en fit 12 fois l’ascension. D’ailleurs dans sa monographie «The Annals of Mont Blanc» (1898) il rend un hommage marqué à ce sommet mythique en retraçant son histoire et décrivant les diverses voies d’accès à ce sommet européen.
A sa mort l’Alpine Club, admiratif de ce personnage exceptionnel, décida d’installer dans le parc de son hôtel préféré une stèle à la mémoire de cet homme mythique de l’Alpine Club. Cette belle pierre est inaugurée en 1905 dans le parc du Grand Hôtel Couttet en présence de ses amis de l’Alpine Club, du peintre Gabriel Loppé , de l’ensemble de la famille Couttet et des représentants de la ville de Chamonix.
Taillée dans le granit cette stèle est sculptée d’un poème dédié à Charles Edward Matthews. L’inscription, rédigée par l’évêque de Bristol, témoigne de la simplicité d’esprit de cet homme exceptionnel.
« Les amoureux de la montagne à un amoureux de la montagne
Les membres de la fraternité alpine à ses membres.
Les frères à l’un de ceux qui ont assisté ses fondateurs
Les Amis à un ami très sûr
Il s’en est allé pleuré de tous »
Matthews retrouve désormais vie pas loin du grand hôtel Couttet
Sources : Alpine Club – Archives association des Amis du Vieux Chamonix
Une femme à qui nous devons beaucoup. Qui ? Madeleine Namur Vallot qui, à Chamonix, s’est battue pour UN droit : celui de porter une tenue masculine : le pantalon !
Et oui, Madeleine Vallot fut la première à oser porter la « culotte ». Que dire des remarques, des sarcasmes lancés sur cette jeune femme qui osait ainsi défier le monde masculin et les esprits bien pensant? Mais elle n’en avait cure ! Emmenée par son père au sommet du Mont Blanc, elle réalisa à quel point une jupe traînant dans la neige était vraiment un réel handicap. Embarrassée par cette masse de tissus, elle osa la remonter au dessus de ses mollets afin de mieux franchir névés et crevasses. Et de retour , très vite, elle imagina une tenue adaptée à l’alpinisme. Elle gravit sept fois le Mont Blanc dont 6 en pantalon et deux fois elle resta plus de 10 jours à l’observatoire créé par son père Henri Vallot.
Son expérience lui permit d’imaginer une tenue vestimentaire adaptée à l’alpinisme et au ski. « Nous devons emprunter à nos camarades masculins, la culotte si pratique » disait-elle Et lorsque, vers 1905, elle entend parler de ces planches que l’on adaptait au pied, immédiatement elle adaptera sa tenue afin de pouvoir se déplacer correctement sur la neige. Mais quel scandale ! Pour mieux affronter le regard des autres, elle s’alliera avec sa meilleure amie, Marie Marvingt, autre personnalité « moderne » de son temps, pour se montrer en toute impunité ! Quelques femmes dans ces années avant la première guerre oseront les copier mais que de remarques désobligeantes peut on lire dans la presse de l’époque !
Soutenue par son père et son mari et grâce à ses qualités sportives Madeleine imposera son genre et son style.
Mais il faudra attendre l’après guerre pour que les tenues imaginées par Madeleine Namur –Vallot soient peu à peu adoptées par toutes les femmes modernes qui osaient s’aventurer dans ces activités montagnardes qu’étaient l’alpinisme et le ski !
Merci Madeleine Namur Vallot !
Sources : Archives association des Amis du Vieux Chamonix . Revue Femina.
Depuis 50 ans déjà cette association travaille à entretenir et valoriser la mémoire de la Vallée de Chamonix. Mais connaissons-nous vraiment cette association?
A l’automne 1968 Mesdames Mireille Simond et Pighetti de Rivasso constatent que nombre de chamoniards « jettent en Arve » leurs anciens documents encombrant leurs greniers…Elles se mobilisent aussitôt afin que ces vieux papiers soient conservés et mis à l’abri. Dans la foulée, elles créent une association qu’elles nomment « les Amis du vieux Chamonix ».
Les statuts sont enregistrés en mars 1969, avec pour objet « de faire connaître et apprécier le passé de la Haute Vallée de l’Arve, son histoire, ses traditions, son folklore, de découvrir et de conserver les vestiges et les témoins matériels de ce passé ».
Ainsi sont précieusement sauvegardés écrits, objets, documents, photographies, œuvres d’art, etc… Est aussi fondée une bibliothèque-conservatoire de tous les ouvrages ayant trait à l’histoire de la vallée de Chamonix, de la Savoie, du royaume Piémont-Sardaigne, des Alpes, et de la littérature alpine en général.
Chamonix est au cœur d’une histoire particulièrement riche. Chacun prend alors conscience de l’importance du but de cette association et en une année elle compte plus de 180 membres, preuve que cette excellente initiative convainc nombre de chamoniards ! Nombreux sont alors les donateurs qui ouvrent leurs réserves et apportent vieux documents, livres, objets, etc… En une année l’association compte déjà 240 ouvrages !
Dès juillet 1969, la commune confie à l’association la mission de remettre sur pied un musée digne de Chamonix qui, avait disparu depuis 1937.
L’association va gérer le musée alpin jusqu’en août 2001.
Elle ouvre également un autre musée dans le Vieil hôtel de 1840 au Montenvers, restaure, avec l’aide de la Compagnie des guides, le Temple de la Nature , sauve le tunnel-aqueduc gallo-romain du Châtelard près de Servoz, menacé de disparaître dans les travaux de la Route blanche.
Récemment, elle a dressé une liste de plus de 135 bâtiments dignes d’intérêt patrimonial sur le territoire de la commune qu’elle a transmis à la mairie dans le cadre de la révision du PLU.
D’année en année, l’association voit ses archives et sa bibliothèque se développer et nombre d’historiens, ou simplement des amoureux de la vallée figurent parmi les visiteurs qui découvrent, avec étonnement, des documents et livres uniques et instructifs !
D’ailleurs, une centaine de livres rares ont été identifiés par la Bibliothèque Nationale de France qui les a numérisé et que l’on peut découvrir sur le site de la BNF. L’association a été reconnue d’utilité Publique. (A consulter ci dessous en cliquant sur le titre).
D’autre part elle a intégré l’Union des Sociétés Savantes de Savoie. Ces deux appartenances témoignent du haut niveau de connaissances attribué à cette association et de la valeur réputée de son patrimoine.
pochade réalisée au sommet du Mont Blanc en 1873
Elle acquiert en 1982 (et grâce à un prêt à taux zéro d’un membre bienfaiteur) 45 toiles de Gabriel Loppé (dont les très grandes exposées au Majestic), permettant à cette collection de rester dans la vallée. Un trésor inestimable qui fait d’elle la détentrice de la plus importante des œuvres de cet artiste amoureux de Chamonix.
Par ailleurs, grâce à ses archives et à un travail méticuleux et assidu, elle peut désormais mettre à disposition des habitants de la vallée le plus important et le mieux documenté fond de généalogie.
Depuis quatre ans, les membres du comité travaillent régulièrement pour classer d’une manière informatisée les documents papiers et les photos qu’elle possède en espérant un jour pouvoir numériser l’ensemble de cette rare collection. Car elle est riche de près de 20 000 ouvrages (livres, publications diverses, revues, journaux, etc…) et de quelques milliers de photographies en tous genre, de films, de cartes postales.
Elle propose gratuitement des conférences intitulées « A la rencontre de l’histoire » afin que tout chamoniard ou visiteur puisse se familiariser avec l’histoire de notre région.
Elle a rédigé et publié de nombreux ouvrages tels « les Anglais à Chamonix », « le glacier des Bossons et la Mer de Glace », «Edgar Bouillette », « 1860 la Vallée de Chamonix et l’Annexion » et tant d’autres…
Forte aujourd’hui de près de 500 membres, l’association continue avec constance à enrichir et préserver ses collections pour les générations futures. Elle incite toujours les habitants à partager leurs documents familiaux afin que dans cinquante, cent ou deux cent ans les jeunes chamoniards puissent encore accéder à leur histoire
L’exposition pour les 50 ans de l’association vous permettra d’en découvrir toutes les richesses et peut être vous joindrez vous aux adhérents afin que la mémoire de cette vallée soit préservée et accessible aux générations futures.
Chamonix prend petit à petit conscience de la valeur de son patrimoine bâti et entreprend la réhabilitation d’immeubles anciens.
Lorsque l’hôtel Bellevue est construit, probablement dans les années 1900, et non 1890 comme on l’a bien souvent pensé, c’est une Marie Aline Couttet qui en est à l’origine. Marie Aline est la sœur des deux frères Auguste et Adolphe Couttet, les fameux photographes chamoniards. Elle a hérité de son père de ce beau terrain en bordure de la route nationale et descendant vers l’Arve Avec son époux Henri Médard Weissen, originaire du Valais et concierge pour un bel hôtel chamoniard, elle décide de construire un hôtel. A Chamonix , en ce début de siècle, les visiteurs sont de plus en plus nombreux. Henri connaît toutes les ficelles de l’hôtellerie. Confiants, tous deux se lancent dans ce nouveau projet .
Un des frères d’Aline, Auguste ou Adolphe immortalisera cette construction, en faisant de ce cliché une photo rare, montrant les détails du chantier. Aucun autre bâtiment en construction ne sera photographié ainsi dans Chamonix.
Cet hôtel possède une vue magnifique justifiant son nom : Bellevue. Il est des plus moderne, possède dès sa construction un ascenseur et le chauffage central dans toutes les chambres. Très vite, il est réputé pour sa bonne table et l’hiver sa proximité avec la patinoire et les pistes des pistes de luge puis de ski du Savoy le rend particulièrement attractif ; il connaît un vif succès. L’hôtel sera durant quelques années la propriété d’un valaisan Auguste Morand, hôtelier réputé de Martigny . Aurait il aidé Henri au financement du Bellevue ? Pas impossible ! Après 1917 Les Weissen Coutet reprennent le flambeau.
Et après l’achat de la vielle poste dans les années 1930, afin d’en faire une annexe indispensable pour héberger son personnel et celui des clients, la famille transformera peu à peu l’hôtel et aménagera un des plus beaux jardins de la ville. Particulièrement apprécié, c’est peu dire !
Ils auront trois enfants, mais tous les chamoniards se souviennent du dernier, Théau, qui gérera l’hôtel jusqu’en 1972. Passionné de beaux arts, il aime courir les salles de ventes pour ouvrir plus tard un magasin d’antiquités.
La vente des jardins et la construction de l’Hôtel Alpina devant ses fenêtres signeront la fin de l’hôtel devenu désuet. Tous les chamoniards regretteront longtemps le magnifique jardin en bord d’Arve.
Le Bellevue perd ainsi définitivement… sa belle vue.
Elle appartient à l’Eglise Réformée de France mais certains chamoniards continuent à l’appeler la chapelle anglaise !
Nul n’ignore l’importance de la communauté britannique à Chamonix. Elle remonte au XVIIIe lorsque les premiers visiteurs dans la vallée de Chamonix se révèlent être des anglais.
Par la suite et au cours du siècle suivant, ils marqueront à jamais l’histoire de la vallée. Touristes, scientifiques, alpinistes anglais créeront des liens toujours forts avec les chamoniards.
En ce milieu du XIXe, il manquait aux britanniques, de rite anglican, un lieu pour exercer leur culte. Ce sont les hôteliers chamoniards qui ouvraient chaque dimanche leurs salles à manger afin d’assurer le service anglican pour leurs clients. Bien vite, ces salles sont devenues trop petites. C’est alors que « la Société de l’église coloniale et continentale de Londres » demande à la préfecture l’autorisation de construire une chapelle. L’accord est donné, mais on les prie de construire au-delà du centre du village. La société acquiert ainsi de la famille de Mr Desailloud, propriétaire du café de la Fidélité à Chamonix, un terrain pour y bâtir un temple.
La chapelle est construite dès 1859, et inaugurée en 1860. Loin du centre, elle trône, magnifique, au milieu des prés. D’un côté l’on voyait la chute du glacier des Bossons de l’autre celle de la Mer de glace. Pendant ces années de Belle Epoque, des chapelains assuraient les services religieux. Ils consignaient sur un registre tenu à cet effet le nombre des fidèles, les difficultés climatiques, les dépenses effectuées, les personnages importants de passage, le nombre de services. Ceux-ci ne venaient cependant que durant l’été. L’hiver aucun service n’était assuré.
A l’origine le chœur devait, comme toute église anglicane, être orné de vitraux. Seul un a été réalisé, le coût trop élevé et l’arrivée de la guerre ont définitivement arrêté le projet.
Mais lorsqu’il fallait enterrer les quelques anglais décédant dans la vallée, ceux-ci devaient être inhumés dans le cimetière catholique. Et le curé de l’époque manifestait sa désapprobation en ne leur laissant des places qu’hors de l’enclos autorisé.
Ce sont les hôteliers chamoniards ainsi que Venance Payot, maire de Chamonix à l’époque, qui insisteront auprès de la préfecture pour que la petite chapelle anglicane puisse abriter son propre cimetière. En 1871, la communauté anglaise obtient l’autorisation d’y inhumer ses morts. Avec le temps, une vingtaine de britanniques seront enterrés à proximité immédiate de la chapelle.
La première guerre mondiale apporte un changement notoire. Les anglais ne sont plus aussi nombreux à venir à Chamonix. Et peu à peu la chapelle sera utilisée par l’Eglise Réformée de France, bien que les murs soient encore la propriété de « la Société de l’Eglise Coloniale et Continentale de Londres ». Le cimetière accueille alors les inhumations des familles protestantes de Chamonix.
Lors de la loi imposant de mettre les cimetières à l’extérieur des centres villes, la municipalité recevra une lettre de la société demandant expressément que l’on conserve ce petit cimetière à son emplacement afin de conserver la mémoire de ces britanniques qui avaient participé à l’enrichissement de Chamonix ! La commune obtempéra, d’autant que le cimetière était privé.
L’histoire cependant continuera avec les Misses anglaises. Bien qu’anglicanes, elles entretiendront durant la période de l’entre deux guerres l’entretien du temple soutenant le pasteur Chaptal qui assuraient les services religieux à la grande satisfaction des protestants de la commune. Et lors de la sombre période de l’occupation de la seconde guerre mondiale, les fameuses Misses participeront d’une manière très active à l’engagement de la résistance. Elles étaient très aimées des chamoniards.
La chapelle anglaise, devenue temple protestant, est cédée en 1970 puis vendue pour un franc symbolique le 29 juillet 1981 à l’Eglise Réformée de France. Cependant, les anglais, de nouveau nombreux à Chamonix, reconnaissent le temple comme leur chapelle en raison de son histoire plus que centenaire et de l’esprit commun protestant les liants à l’église réformée et bien souvent on peut assister à un mariage anglican assuré par le pasteur de la paroisse du Mont Blanc.
Sources : archives départementales – Eglise réformée de France –
Me connaissez-vous? Vous êtes-vous arrêtés près de moi? M’avez-vous bien regardée? Je suis pourtant là, tout près de la Maison de la Montagne.
Je vois défiler du monde, beaucoup de monde…
Mais combien s’arrêtent devant moi? Savez-vous qui je suis et pourquoi je suis là?
J’ai été réalisée par Gilles Vitaloni, sculpteur diplômé des Beaux Arts de Carrare, sorti de l’école d’art Pietra Santa. Ce n’est pas rien! Il adore travailler le marbre, cette matière si exigeante, si délicate à sculpter.
En 1992, il participe à un tour de France de la sculpture dans le cadre des J.O. d’Albertville et réalise des œuvres d’art en public, Chamonix sera une de ses étapes. Peut être certains se souviennent-ils de Gilles travaillant devant le foyer de ski de fond de l’époque! Parce qu’il est à Chamonix, c’est sur un bloc de granit, que Gilles travaille à son œuvre. Certes, la pierre ne provient pas de la vallée mais du Tarn où sont encore exploitées dans les années 1990 des carrières de ce matériau si dur à façonner. Gilles travaille en public, il aime échanger avec les promeneurs. Il veut que chacun participe à son œuvre. Il s’inspire des remarques faites par les flâneurs. Il me donne mon nom: Escalade. Oui, car ici dans cette vallée l’alpinisme se confronte à ce granit, si robuste, si compact et si puissant. Regardez-moi. Admirez les 4 faces de mon bloc !
Je suis à l’image de l’esprit rude du montagnard. Je suis là, ancrée dans ce paysage, près de cette maison qui voit défiler tant de guides connus ou pas, et dont l’activité, l’escalade, est le cœur de leur vie. A mon pied le nom de Chamonix est gravé car je devais partir représenter la station ailleurs! Le choix de mon sculpteur était «ESCALADE» Finalement je suis restée ici. Gilles a eu la modestie de ne pas graver son nom. Dommage ! , ne mériterait-il pas d’avoir son nom gravé à mon pied?
L’hôtel le Savoy était occupé depuis 1963 par le CIT puis en 1970 par le Club Méditerranée. Cette année il va vers un nouveau destin. Mais connaissez vous son histoire ?
Photo collection Gay Couttet
Elle s’appelle Sarah, est la quatrième de la fratrie de 5 enfants de la famille François Couttet dit « Baguette ». Elle a 16 ans à la mort de son père, 18 à la mort de sa mère. Élevée dans la pure tradition hôtelière depuis sa petite enfance, elle seconde sa sœur aînée Aline pour gérer l’hôtel familial du Grand Hôtel Couttet, jusqu’à la majorité de ses frères Jules et Joseph.
En 1899 à l’âge de 26 ans elle se marie avec Adolphe Tairraz le frère du grand photographe Georges Tairraz. Dans la succession elle hérite d’un beau terrain au pied du Brévent. Et c’est là qu’en 1901 elle lance avec l’aide d’un emprunt auprès d’une banque suisse la construction d’un hôtel de luxe. Elle l’appelle le Savoy Hôtel, nom choisi en raison du célèbre « Savoy Hôtel » de Londres connu par toute la clientèle internationale. C’est le cabinet d’architecture genevois De Morsier et Weibel qui construit cet élégant hôtel à l’image des palaces européens. Celui-ci connait immédiatement un vif succès. C’est le premier hôtel à posséder l’eau courante dans toutes les chambres dont les suites possèdent des salles de bain. Un ascenseur est installé
en 1903 et un orchestre joue tous les soirs dans la grande et magnifique salle à manger de l’hôtel.
Adolphe meurt en 1906 la laissant seule avec 2 enfants Armand et Germaine. Elle a 33 ans. Seule, elle gère avec brio l’hôtel. En pleine Belle Epoque le Savoy Hôtel connait un réel succès. On y voit la reine d’Italie, son altesse impériale et royale Otto de Habsbourg, la belle actrice Rose Caron ou le milliardaire américain Pierpont Morgan et même le légendaire Buffalo Bill en 1907 ! Elle s’engage alors dans le projet d’un agrandissement. Sous la conduite d’un autre cabinet d’architecture genevois c’est Joseph Guglielmetti entrepreneur ambitieux qui le réalise. Ce sera la magnifique aile couronnée d’un toit pyramidal et sur lequel elle fait sculpter une croix de Savoie de chaque côté du balcon supérieur. Dans la même année elle inaugure cette aile particulière et épouse l’entrepreneur le 7 juillet 1911 avec qui elle aura 4 enfants.
Publicité été avec les tennis années 1935 Collection Bernadette Tsuda
L’hôtel prend le nom de Savoy Palace.
Il connait alors ses heures de gloire jusqu’à l’entrée en guerre de la première guerre mondiale. Les années d’après guerre appelées les « années folles » voient arriver au palace une clientèle excentrique, riche.Les journaux locaux se font l’écho de ces fêtes somptueuses se déroulant au Savoy palace : « orchestres, danse, bals masqués, fêtes mondaines et galas, compétitions de tennis » sont les publicités de l’époque. Avec l’arrivée de la seconde guerre mondiale son fils Armand Tairraz prend la relève et gère le palace un temps avec son demi frère Charles Guglielmetti.
En 1945-1946 l’architecte Henri Jacques le Même aménage la terrasse supérieure. L’hôtel reprend en 1947 son nom d’origine « Savoy Hotel » perdant sa qualité de palace, Armand ayant beaucoup de peine à maintenir à flot cet ancien hôtel de luxe. Les travaux de modernisation sont trop coûteux et de plus il ne s’entend guère avec son demi frère et les frais liés à l’indivision sont particulièrement élevés pour Armand.
Le glorieux établissement sera finalement acheté en 1960 par le baron Elie de Rotschild, très vite il se rend compte qu’il perd chaque année 50 millions de francs. Confié à un fond de pension l’hôtel est loué au CET ( (club européen du Tourisme) en 1963 . Ce CET Absorbé par le Club Méditerranée le Savoy deviendra en 1970 un de ses fleurons.
Depuis de nombreux travaux ont été réalisés. Mais quasiment tout du décor original disparaît dans des travaux de modernisation. Fort dommage car on aurait pu, à l’image du Majestic, garder et rénover au moins l’ensemble des salons et salle à manger ! Même l’escalier principal a disparu !
Le Savoy Hôtel n’est plus occupé par le Club Méditerranée. Propriété d’un fond de pensions il est à ce jour loué à un nouveau groupe hôtelier appelé Folie Douce.
L’ensemble du rez de chaussée a été entièrement détruit pour ne faire qu’un seul et unique espace . Plus rien n’existe du palace d’antan , ici les murs sont bruts de décoffrage! Le décor est surprenant ! parfois intrigant. En tout cas très décalé. Certains peuvent aimer !
La façade principale est , de nuit, éclairée par une lumière passant du bleu au rose…à l’image des maisons closes des années 1900 !
L’entrée ouvre sur un bar monumental, de là un escalier conduit dans une fosse où musique , danseurs , clients se mêlent dans une rumeur houleuse et bruyante. Trois restaurants aux thème différents se trouvent sur le même niveau. 250 chambres aux tarifs variés du très cher au bon marché, 220 personnes y travaillent….
Le temps passe, que restera t’il de cet ancien palace fleuron de l’architecture chamoniarde .
Les deux Croix de Savoie ornant le balcon supérieur de l’aile construite en 1911 et la très belle ferronnerie typique Art Nouveau
Aux Rebats se trouve une des maisons typiquement chamoniarde de la fin du XIXe. Édifiée à une période où l’on redoute les incendies destructeurs, son propriétaire l’a édifiée selon un style purement local. Construite en pierres et ciment recouverts de crépi, elle est toute simple.
A sa construction, en 1898, elle fut construite pour devenir la « Pension Sylvain », ce qui justifie évidemment quelques chambres ouvertes sur un balcon pour profiter de la vue sur le Mont Blanc. Mais qui est donc ce Sylvain ?
Ce Sylvain fait partie de ces personnages emblématiques oubliés de l’histoire locale. Sylvain Couttet, guide, a laissé dans la mémoire alpine quelques souvenirs remarquables. Particulièrement dynamique, il tient avec sa femme le pavillon de Pierre Pointue situé sur le chemin vers le Mont Blanc. C’est là qu’il va se faire remarquer, car volontiers disponible, il accompagne bien souvent de nombreux touristes vers la cabane des Grands Mulets et vers le sommet du Mont Blanc.
En 1866, en raison du nombre croissant de visiteurs, la compagnie des guides décide d’édifier un nouveau refuge aux Grands Mulets. Sa construction est confiée à Sylvain Couttet, à charge pour lui de transporter les matériaux, ce qui sera fait avec l’aide des guides chamoniards.
Cette même année il interrompt ses travaux pour participer aux secours lancés par le guide François Couttet et Gabriel Loppé partis à la recherche d’un des frères Young décédé au cours de la descente du Mont Blanc.
Toujours en 1866, plus tard dans la saison, parti avec le capitaine Arkwright, il échappe à l’avalanche meurtrière qui ensevelit le capitaine et deux de ses guides. Désespéré, il assure durant plus de 15 jours les recherches afin de retrouver ses compagnons d’infortune mais jamais il ne retrouva le corps du jeune anglais !
Plus tard encore, en 1870, lors de cet été mémorable où le temps n’a jamais été clément, on retrouve notre gardien toujours prompt à partir au secours des accidentés, malheureusement cet été là sera un été funeste puisque onze individus décédèrent en raison du très mauvais temps.Il montre toujours une grande compassion envers les familles.
Sylvain va tenir ce refuge de 1866 à 1881. A la lecture des journaux de l’époque, les alpinistes parlent de lui comme… « le meilleur guide de Chamonix, qui passe sa vie sur les glaciers et qui a conduit de nombreux voyageurs au sommet de la cime ; il est de bon conseil, bon à l’action, a l’expérience de la montagne, a du sang froid, est courageux et est une force de la nature… »…
Le 31 janvier 1876, à 42 ans, il participe à la première ascension du Mont Blanc en hiver avec le couple Charlet-Stratton . Et c’est à lui que l’on doit le récit de cette ascension publiée dans les journaux de l’époque.
En 1881, il abandonne la gestion du refuge des Grands Mulets. Il tien l’hôtel Beau Site et en 1898 la maison du personnel devient une pension appelée Pension Sylvain. Il n’en profite que très peu puisqu’il décède en 1900.
Sa femme Marie Denise Charlet, avec qui il avait escaladé le Mont Rose en guise de voyage de noces, tient l’auberge jusqu’en 1907, année de son décès.
Bibliographie : Le Mont Blanc de Charles Durier, Les fastes du Mont Blanc de Stephen d’Arve, le « XIXe » journal quotidien l’Abeille, « le petit journal »
En juin 1888, la préfecture de Haute Savoie autorise Auguste Alfred Couttet, voiturier et guide , à « …construire une maison sur le côté droit de la Route Nationale ». Décédé dix ans après, c’est sa fille Augusta Ernestine qui, héritant d’un quart de la maison construite par son père , rachète le reste à son frère. Avec son mari Jean César Couvert ils créent en 1902 l’hôtel « Fin Bec et des Fonctionnaires ». Il abrite 20 chambres. Ce petit hôtel propose une cuisine dite « bourgeoise »
Et oui ! On ne s’appelle pas hôtel « Fin Bec » pour rien ! Et la qualité d’un restaurant fait la renommée du lieu ! La publicité précise qu’il y a de l’électricité, une chambre noire, le chauffage central et des bains. Certes, nous ignorons si les bains étaient dans toutes les chambres,probablement pas. L’habitude à l’époque était d’avoir une salle de bains à l’étage. Mais la précision de l’électricité, qui n’était pas toujours généralisée dans Chamonix, et l’installation du chauffage central nous montrent le désir de la part du propriétaire de proposer un hôtel confortable et chaleureux ! Il est intéressant aussi de noter la remarque sur une « chambre noire ». En fait, déjà à cette époque, les appareils de photographie s’étaient miniaturisés et les clients aisés possédaient leurs propres appareils. Avec une chambre noire, ils pouvaient procéder à la technique du développement de leurs photos. Un argument de poids pour le client passionné. Et afin de rassurer la clientèle potentielle, on précise bien que le propriétaire, Jean César Couvert, est ancien chef de brigade de gendarmerie. Pour rassurer la clientèle ? Pour inviter les fonctionnaires à se rendre dans cet hôtel là plutôt qu’un autre ? Probablement les deux !
En 1908, l’hôtel prend le nom d’Hôtel-restaurant du Fin Bec, officiellement tenu par Couvert-Couttet. Il perd son appellation des fonctionnaires. Manifestement, l’hôtel fonctionne car bien répertorié par le Touring Club, référence importante de l’époque. A partir de 1927, l’hôtel est mentionné comme Hôtel Fin Bec et Lutetia. Pourquoi ce nom ? Est-ce en rapport avec le Lutetia du boulevard Raspail à Paris. Peut être !
Il est vrai que la famille entreprend d’agrandir l’hôtel. En 1929 on le surélève de 3 étages. Il est tenu par l’ensemble de la famille « Couvert-Couttet et fils ». Il y a alors 52 chambres, presque toutes face au Mont Blanc et au 1er étage sont créées deux appartements avec cuisine, nouveauté à l’époque. Le dernier étage , sert de séchoir à linge les jours de mauvais temps mais aussi de réservoir à eau. Ce Lutetia a un petit air d’hôtel parisien avec son toit à la Mansart !
Mais la guerre arrivant, l’hôtel, comme nombre d’hôtels à Chamonix, ferme. En 1939 il est réquisitionné un temps par l’armée française pendant la période 1939-1940. Il est bien difficile de le rentabiliser avec la menace de la guerre, la clientèle est rare. L’hôtel finalement ferme. De plus, en 1942 meurt Jean César Couvert. L’immeuble est alors divisé et vendu en appartements.
Un des héritiers, Martial Couvert (fils d’Ernestine), rachète le rez de chaussée afin de continuer d’exploiter avec sa femme Alice un restaurant brasserie qui, toujours appelé le Fin Bec, puis finalement le Lutetia, connait une belle réputation. Martial avait fait l’école hôtelière Lesdiguères de Grenoble et la réputation du restaurant n’était pas usurpée. Un beau livre d’or rappelle le souvenir du passage de Maurice Baquet, Jean Constantin, Lionel Terray, la patineuse Jacqueline Vaudecrane, l’actrice Ann Todd ou encore l’acteur Jean Tissier ou le réalisateur David Lean.
A ce jour le Lutetia trône ainsi face au Richemond au cœur de la rue Michel Gabriel Paccard et nous rappelle ainsi les temps ou un chamoniard (Alfred Auguste Couttet), voiturier en contact avec une belle clientèle, entreprend de se lancer dans l’hôtellerie et dont les enfants sauront se mettre au goût du jour. Une belle histoire locale !
Merci aux membres de la famille Couvert qui ont bien voulu m’ouvrir leurs archives .
Tous, nous avons été impressionnés, récemment par l’engagement sans faille de l’équipe de 2 grimpeurs polonais ( Adam Bielecki et Denis Vurubko)qui, sans hésitation, se sont précipités en abandonnant leur projet initial au K2 pour se lancer au secours d’ Elisabeth Revol et de leur ami alpiniste Tomek Mackiewiz perdus sur le Nanga Parbat.
Cet engagement de la part d’alpinistes polonais en haute montagne nous fait penser à un engagement similaire se déroulant dans la vallée de Chamonix en 1957.
Stanislaw Gronski
Stanislas Gronski, polonais originaire de Zakopane, était un alpiniste chevronné.
En août 1957, Il enchaîne quelques sommets dans les Alpes françaises et se lance dans la traversée du Mont Blanc. Il n’en revient pas. Les secours sont engagés pour le retrouver. Immédiatement, se joint aux sauveteurs locaux un des ses chers amis de montagne et d’escalade, Wawrzyniec Laurent
ZULAWSKI. En ce mois d’août, il n’est pas à Chamonix, il est à Paris. Il se précipite et forme une équipe franco-polonaise pour essayer de retrouver son compagnon. Il ne peut supporter l‘idée que celui-ci ait disparu. Hélas, le 18 août, sans avoir retrouvé Gronski, Zulawski est emporté à tout jamais par une avalanche de séracs sous la pente septentrionale du Mont Blanc du Tacul et paye ainsi de sa vie sa tentative de sauvetage.
Les deux hommes reposent depuis dans les entrailles du glacier. Ils n’ont jamais été retrouvés. Leur amitié indéfectible et leur passion alpine les a rassemblés désormais sur les pentes du Mont-Blanc.
Sur le mur du cimetière de Chamonix, deux plaques commémoratives immortalisent la mémoire de ces deux grands alpinistes.
Par ailleurs ces deux hommes étaient des personnages hors du commun. Alpinistes connus de l’histoire alpine, ils avaient tous deux été des résistants notoires. Stanislas Gronski avait beaucoup aidé à s’enfuir par la montagne polonaise ceux qui cherchaient à fuir la dictature nazie, il avait, par ailleurs, participé à la révolte de Varsovie.
De même Zulawski , alpiniste de renom, avait participé en 1937 à la 12ème ascension du Mont Blanc par l’arête de l’Innominata et en 1938 à la traversée orientale du Mont Blanc par l la Sentinelle Rouge. Résistant dès les premières heures, il avait caché chez lui des juifs à plusieurs reprises, ce qui lui a valu après la guerre d’être nommé « Juste ». De plus, il était musicien, compositeur, et aussi auteur de cinq ouvrages sur l’alpinisme. Un très grand « Bonhomme », non grisé par le succès et qui n’a su écouter que son cœur pour partir à la recherche de cet ami si précieux.
Sources : revue polonaises de montagne Taternik. Archives de la ville de Zakopane. Cimetière de Chamonix
Ce 25 janvier 1924, à l’ouverture de cette « Semaine Internationale de Sports d’Hiver » se déroulant à Chamonix et qui prendront par la suite le nom de Jeux Olympiques, les conditions météorologiques suscitaient pas mal d’inquiétude !
Au début du mois de décembre 1923, il n’y avait qu’à peine 10 cm de neige dans la vallée. Vers le 20 décembre, l’épaisseur atteint 25cm. Puis la semaine suivante plus d’un mètre de neige tombe à Chamonix. De nombreuses avalanches se déclenchent et les routes sont coupées. L’épaisseur de neige au sol le 27 décembre est de 1.40mètre . Ainsi , le fameux et immense stade de glace construit pour l’occasion est, un mois avant l’ouverture, recouvert d’une épaisse couche de neige L’armée est sollicitée pour participer aux travaux de déneigement. On fait également appel aux chamoniards qui donneront de leur temps pour honorer cette fête à venir.
En début de janvier 1924, il se met à faire un temps splendide, froid et sec, qui persiste durant deux semaines, à la satisfaction de tous. On travaille dur. A la mi janvier, grand redoux. Pluie, gel se succèdent… Il se met à pleuvoir des trombes d’eau les 19 et 23 janvier ! La patinoire se transforme en lac à la veille de la cérémonie d’ouverture ! En 24 h grâce aux bénévoles et à l’armée et au temps qui se remet au très beau et très froid, on remet en état la patinoire qui doit servir pour l’inauguration.
Le jour de l’ouverture tout est prêt. Il ferra un temps splendide mais très froid durant toute la période des jeux ! Les températures resteront glaciales accompagnées d’un vent vif et de tourbillons de neige aveuglante rendant les compétitions parfois très difficiles, autant pour les compétiteurs que pour les jurys. Certains concurrents des courses de ski de fond (18km et 50km) eurent les doigts gelés, beaucoup abandonnèrent… L’équipement n’était pas celui que nous connaissons maintenant bien sûr.
Comme quoi la météo, de tous temps, est parfois bien capricieuse !
Presqu’un siècle plus tard, on connaît toujours ce type de temps à Chamonix en janvier !
Petits, grands… Tous connaissent le champ de ski du Savoy
Les débuts des sports d’hiver se développent à Chamonix dès les années 1900. Les champs situés en amont de l’hôtel Savoy deviennent le lieu des jeux de neige courus par toute la clientèle fréquentant les hôtels et palaces chamoniards. C’est tout d’abord avec des luges que les touristes viennent se faire des frayeurs sur ces pentes situées au pied de la montagne de la Côte et jusque dans les année1920 -1924 (année des Jeux Olympiques) ce sera l’activité principale du lieu.
Après les J.O, peu à peu le ski prend le relais et on ne peut qu’être admiratif de tous ces sportifs chamoniards et touristes qui remontaient à pied les pistes. Il n’empêche que tous font des progrès fulgurants! Les styles se perfectionnent! Les chamoniards ne s’en laissent pas compter et développent eux même de belles techniques.
Dans les années 1980 on fera un tunnel sous la piste, bien opportunément car la circulation était devenue intense !
Certains se souviennent probablement du téléski des Pylônes (ou de la Roumna) construit en 1946 et ouvert jusqu’en 1979. Téléski raide et pentu qui faisait suite au téléski de la Côte et qui desservait une piste dans le bas du couloir du Brévent, et une autre tracée directement sous les câbles …
Ce qui est amusant à propos de la piste des Pylônes c’est qu’elle était aussi accessible (jusqu’en 1945) par le téléphérique du Brévent lui-même dont la benne s’arrêtait au second pylône. Là les clients pouvaient descendre par une passerelle en bois et pouvaient ainsi accéder au domaine de ski.
Dans le champ du Savoy, dans les années 1950, sera construit le petit téléski de la Samaran permettant aux débutants d’affronter une piste moins raide que celle de la Côte. Et depuis les années 2000 un tapis roulant complète l’ensemble du domaine du Savoy.
Il faut savoir que ces champs du Savoy appartenaient à un ensemble de propriétaires privés qui, en été, jusque dans les années 1965 y faisaient paître leurs bêtes. Il fallait donc une autorisation d’exploitation de ces champs durant l’hiver. C’est en 1979 que sera remembré l’ensemble de ces terrains. La commune devient propriétaire du bas du Champ du Savoy, par contre la piste de ski du haut appartient encore à des privés qui ont signé avec la commune un accord d’exploitation durant l’hiver. On remarquera en été que ceux-ci sont rendus inaccessibles par des barrières.
Petits,U grands… Tous connaissent le champ de ski du Savoy…
Cert
Un grand merci à Denis Cardoso, collectionneur passionné de l’histoire des remontées mécaniques de la vallée de Chamonix
Le premier refuge alpin de Chamonix : le temple de la Nature au Montenvers
Il a vu passer Chateaubriand, les impératrices Eugénie, puis Marie Louise et aussi Victor Hugo, Charles Nodier, Lord Byron, Mary Shelley, Georges Sand, Liszt, Alexandre Dumas et tant d’autres…. Il est maintenant en bien piètre état… Notre fameux « Temple de la Nature », chanté par les romantiques du 19ème siècle.
Qu’est-il ? Un petit bâtiment de forme ovoïdale, situé au Montenvers, au-dessus du Grand Hôtel du Montenvers .
Il faut dire qu’il est là depuis 1795. Il a succédé à un petit abri offert par un anglais, Mr Blair, en 1779, pour abriter les voyageurs venus découvrir la Mer de Glace. Très vite en mauvais état, il est abandonné. Les voyageurs ont des difficultés pour s’abriter des intempéries.
Chamonix doit alors la construction du nouveau bâtiment à Mr Marc Théodore Bourrit. Mr Bourrit, chantre genevois, est amoureux fou de cette vallée. Il est le meilleur publicitaire de l’époque et est désolé de l’aspect du vieil abri. Il obtient l’appui financier nécessaire de la commune de Chamonix et du « Résident de France de Genève » pour mettre en route la construction d’un nouvel édifice.
« Le 10 floréal an III de la république, une et indivisible, vu la pétition du citoyen Bourrit… tendant à et autorisé à faire construire une maison sur le mont envers destinée à recevoir les voyageurs savants et à contenir tous les instruments de musique nécessaires pour observer les rares beautés de la nature… Ne laissent pas douter que cet établissement ne soit une bienfaisance pour la commune qui deviendra propriétaire de la bâtisse et pour les amateurs et les savants qu’elle attirera en leur présentant tout à la fois un hospice et un observatoire à près de 800 toises au dessus de la mer où est suspendu le glacier du Montenvers.
C’est le premier refuge alpin. Il comprend une pièce et un petit grenier. Il est alors dédié à la nature, d’où son nom « le Temple de la Nature ». Il sera malheureusement vite dégradé, mais aussi vite restauré par le comte de Pontencoulant, préfet d’Empire qui remet à l’aubergiste Mme Coutterand les fonds nécessaires pour les réparations.
C’est alors que le refuge connaît ses heures de gloire et que l’on y verra passer les plus grands noms de la littérature, de la peinture et des sciences. En 1817, Joseph Tournier, le premier adjudicateur du Montenvers, y ouvre une boutique de naturaliste. Il est repris en 1827 par Joseph Marie et David Couttet qui en font un cabinet d’histoire naturelle et installent un registre de voyageurs. C’est le passage obligé des voyageurs au Montenvers!
En 1840 est construit juste à côté une auberge qui deviendra un petit hôtel. Mais les visiteurs s’arrêtent encore au temple de la nature. La construction du grand hôtel du Montenvers en 1880 lui sera néfaste… Il servira de buanderie…
Très endommagé, il est sauvé en 1950 par Charles Vallot. Il fait appel au comité des Sites et Monuments historiques du Touring Club. Mr Laprade, architecte en chef des palais Nationaux, dirige les travaux. Il est joliment restauré, mais peu à peu la commune s’en désintéresse et ne se préoccupe pas de l’entretenir.
Il faudra attendre 1973 pour que l’on entreprenne des travaux de réhabilitation grâce à l’association des AMIS DU VIEUX CHAMONIX. Une équipe de guides chamoniards dirigés par les services techniques de la ville entreprennent la restauration du « Temple de la nature » et des anciennes écuries. L’association se voit confier l’entretien du bâtiment et la charge d’en faire un mini musée pour les périodes estivales.
Ce mini musée fonctionnera jusqu’à la période où le musée alpin devenant un musée d’Etat l’association ne peut plus s’occuper du « temple ».La commune l’abandonne, le Musée alpin ne s’en occupera plus.
La compagnie du mont Blanc a il y a quelques temps proposé une animation. Puis plus rien.
Depuis notre temple de la nature se détériore peu à peu…
La compagnie du mont Blanc a il y a quelques temps proposé une animation. Puis plus rien.
Depuis notre temple de la nature se détériore peu à peu…
Sources : Théodore Bourrit – Charles Vallot – Archives Amis du Vieux Chamonix
Les anciens à Chamonix se souviennent encore du « Beau Muck ».
Personnage marquant de la période de l’entre deux guerres, «Muck » était de toutes les fêtes, de toutes les rencontres. Nombreux sont les chamoniards qui en parlent encore avec humour et tendresse.
Henry Mückenbrünn, surnommé « Muck », arrive à Chamonix en 1924 avec l’équipe polonaise de ski pour participer aux J.O. Les polonais disent qu’il est venu à Chamonix seulement en 1926.
A Zakopane, son pays d’origine, dans les montagnes des Tatras, il est la gloire nationale. 7 fois champion de ski, 2 fois détenteur du record de saut à ski , il est la star de l’équipe. Très apprécié de ses compatriotes, il a laissé, encore de nos jours, un souvenir ému dans son village d’origine,
Cependant il ne retournera à Zakopane qu’une seule fois : en 1933 .Là il participera en tant que juif polonais à des jeux appelés « les maccabiades » les premiers jeux hiver juifs. Ces jeux avaient été troublés par la jeunesse anti sémite polonaise. Est ce pour cette raison qu’il ne retournera plus jamais dans son pays natal ? Nul ne le sait
Excellent skieur, excellent sauteur, il se lance dans la compétition, connaissant un vif succès. Mais i l faut gagner sa vie, or on ne s’enrichit pas avec des médailles et très vite il entreprend de donner des cours.
Il co écrit avec le doctuer Hallberg un livre sur les techniques de ski, sur le matériel de ski mais aussi sur les exercices à faire pour se préparer à ce sport exigent.
Beau parleur, belle carrure, il séduit immédiatement la clientèle aisée venant à Chamonix. Il comprend tout l’intérêt de s’occuper avec attention de ces dames un peu « inaptes» sur leurs skis. Enlacées par cet homme vigoureux qui les emmène sur les pentes enneigées, elles se laissent griser par la vitesse… C’est fantastique ! D’autant que cet homme, au léger accent slave, danse la valse à merveille. Dans les salons de l’hôtel des Alpes ou du Majestic, les jeunes chamoniardes et les belles «demoiselles» rivalisent pour essayer de se retrouver dans ses bras le temps d’une danse.
Habile commerçant, il est le meilleur de l’époque, vendant, revendant ce matériel de ski toujours de plus en plus perfectionné. Ce beau skieur et ce séduisant moniteur est forcément de bon conseil… Profitant de leur naïveté, « Muck » abuse « un peu » … Mais c’est fait avec un tel charme !
Slave, c’est aussi un grand romantique … Il tombe fou amoureux de Madeleine, jeune mannequin venue présenter au col de Voza des collections de mode.
Pour elle, il devient architecte, décorateur et il construit un des plus beaux chalets des Pècles. A l’intérieur, tout est sculpté de ses mains (ou presque) : portes, meubles, placards , plafonds. Le résultat est magnifique ! Il a un talent incroyable, issu de ses racines polonaises. A Zakopane encore de nos jours le travail du bois est remarquable.
Mais la guerre arrive avec son lot de désespérances. Le beau Muck est juif polonais et fait des envieux . Dénoncé, il est arrêté par la milice, il s’enfuit et se cache dans la région d’Annecy..
Ses activités reprennent après la guerre, mais on n’est plus dans la période des années folles ! Il vend son beau chalet et trafique un peu. Le moniteur n’est plus aussi fringuant, d’autres ont pris le relais.
Il connaîtra une fin tragique en avril 1956, emmenant avec lui dans la mort une des plus belles personnalités de Chamonix, le guide Paul Demarchi.
Nombre de photos belles et variées nous montrent l’importance qu’ont joué les mulets dans le développement touristique de Chamonix.
Les voyageurs n’étaient pas toujours des marcheurs habitués à la montagne, aussi ce moyen de déplacement leur convenait parfaitement bien. On compte plus de 300 mulets en 1879 ! Ce n’était pas anodin car pour ces mulets il y avait une réglementation très stricte liée à celui de la compagnie des guides.
Dans le règlement de 1879 de cette compagnie, il y a une dizaine d’articles concernant les mules et mulets!
Tout d’abord, dans la première quinzaine du mois de mai, se pratiquait la revue des mulets et de leur harnais. Ceci sous le contrôle du maire, du président du conseil d’administration, du guide chef, d’un vétérinaire, d’un sellier. Si les bêtes étaient impropres au service elles étaient refusées. Et si pendant la saison une monture était signalée comme vicieuse ou inadaptée à sa fonction on procédait à une expertise spéciale.
C’est le guide chef qui les inscrivait au tour de rôle si elles étaient reconnues aptes au service. C’est encore lui qui fournissait le nombre de montures nécessaires pour chaque client. Les mulets et montures étaient sujets à un tour de rôle comme les guides. Chaque monture devait être munie d’une selle pour hommes et d’une selle pour femme, des harnais, bâts, courroies et autre objets nécessaires, le tout devant être en bon état.
Dans les passages difficiles, les voyageurs ayant plus de quatre mulets devaient avoir deux guides. Il était interdit de maltraiter les mulets sous peine de privation de tour de rôle.
Les familles n’étaient autorisées qu’à une seule monture, c’était le drame si la monture n’étais ps acceptée.
Une mule ne pouvait être inscrite que par son propriétaire.
Chaque monture portait au sabot son numéro d’ordre et était numérotée aux frais de la compagnie.
Le mulet arrivé en retard ou pas convenable harnaché perdait son tour de rôle.
Il fallait payer un droit d’inscription et les frais de visite de 4 francs.
Le prix de la course du mulet était payé au guide qui l’avait dirigé.
Ce guide devait immédiatement payer son dû au propriétaire du mulet sinon il perdait son tour de rôle. Le guide qui proposait aux voyageurs une bête non inscrite au tour de rôle prenait le risque, non seulement d’une forte amende, mais aussi de perdre son tour de rôle.
Tout guide qui avait maltraité ou laissé stationner le long des routes, devant les auberges ou ailleurs, les montures qui lui avait été confiées était passible de la perte du tour de rôle ou pire en cas de récidive.
Il était interdit à tout jeune homme de retourner les montures avant l’âge de 14 ans. Les guides qui employaient comme rantourneurs des enfants âgés de moins de 14 ans étaient passible de perte de deux tours de rôle.
Les mulets seront pendant plus de cinquante ans au cœur de la vie touristique de la vallée. Lors du projet de la construction du train du Montenvers, les chamoniards se sont fortement opposés à ce nouveau moyen de transport, voyant là une concurrence néfaste à leur activité. Les mulets connaîtront encore au début du XXème siècle une activité touristique, pour le glacier des Bossons, le Brévent, la Flègère, le glacier d’Argentière… Mais la modernité et les débuts des téléphériques marqueront la fin définitive de ce type de locomotion.
Ce n’est pas nouveau… Déjà en 1865, on étudiait le passage des touristes dans la vallée de Chamonix.
Ils fréquentent pourtant le prieuré de Chamonix depuis près d’un siècle.
En 1783 ils étaient 1 500 !
En 1830 on en compta 3 000.
En 1861, la vallée est française depuis un an, l’Etat se préoccupe du tourisme et édite déjà une série d’ouvrages afin de promouvoir la Savoie. De magnifiques lithographies sont éditées et on compte de plus en plus de visiteurs se présenter dans ce nouvel éden touristique qu’est la vallée de Chamonix.
1865 marque la 1ère année d’une grande fréquentation. Certes la route promise par Napoléon III n’arrive pas encore au centre de Chamonix, mais les touristes affluent très nombreux malgré l’accès difficile avec des chars à bancs !
Si de 1786 à 1860 (en 64 ans) on dénombre 115 cordées vers le Mont Blanc, on en compte 178 de 1860 à 1865 (soit en seulement 5 ans). Le mouvement est donc lancé.
En 1865 on compte 2 747 français alors qu’on reçoit 3 669 anglais, 3 004 américains, 1 097 allemands, 227 belges, 214 italiens, 173 russes (membres de famille impériale, officiers de la garde), 119 suisses, 108 hollandais, 43 espagnols, 4 turcs, 2 indiens et 382 non répertoriés.
Soit 11 789 visiteurs au pied du Mont Blanc alors que Saint Gervais ne reçoit que 320 étrangers et seulement 32 voyageurs se rendent dans la vallée du Giffre. Le nombre des visiteurs à Chamonix aura quadruplé en 35 ans. L ‘état s’en félicite et on précise que… « l’intérêt de Chamonix n’est pas seulement local , c’est un intérêt général, Chamonix est le rendez vous des touristes du monde entier et leur affluence par la facilité des communications deviendra une source inépuisable de prospérité pour notre département ! »
Les jours de pointe sont les 16 et 17 juillet, 22 et 29 août.
Cette même année, 35 alpinistes réussissent l’ascension du Mont Blanc.
La saison en 1865 débute vers la fin juin pour se clôturer début octobre.
En ces années de milieu de siècle Chamonix a déjà une grande expérience de l’accueil, les hôtels sont nombreux.
L’hôtel Royal (actuel Casino) de grande réputation, Hôtel de Londres et d’Angleterre, Hôtel de l’Union (construit en 1816. détruit en 1930), Hôtel de Saussure ou Grand Hôtel Impérial (actuel Hôtel de Ville), Hôtel de la Couronne, (actuelle résidence du Relais de poste) Hôtel du Nord, Hôtel Mont Blanc, Palais de Cristal, A la Réunion des Amis chez Simond ( il est précisé propre et prix modérés), Pension des Alpes.
Il est notifié que l’on trouve des Bains à l’hôtel Royal et à l’hôtel de Londres.
Sur le guide Joanne (ancien guide bleu) de 1865 il est précisé que : « ces hôtels, surtout les trois premiers, sont aussi bien tenus que ceux des grandes villes, mais… depuis 20 ans ils ont beaucoup élevé leurs prix. Du reste pendant les mois de juillet et août, il est souvent difficile de s’y procurer une chambre. »
A Chamonix, on trouve des cafés avec des billards, des cabinets de lecture, des magasins de diverses denrées. On informe que l’on peut admirer les plans en relief du Mont Blanc chez Michel Carrier. Et il est de bon ton de se promener en début de soirée avec ses plus belles tenues vers la passerelle située au dessus de l’Arve. La poste est ouverte tous les jours de 7h du matin à 21h ! On recommande la boutique de Venance Payot, naturaliste, pour la qualité et la variété de ce qui y est vendu. On mentionne les photographies publiées par les frères Bisson, Baldus, Soulier, Ferrier, Braun…
On évoque également le règlement de la Compagnie des guides datant de 1862 avec ses diverses particularités! On donne avec précision les tarifs des guides, des porteurs, des mulets. On recommande certains plus que d’autres ! La liste des excursions est longue : les différentes cascades, le Brévent, le Montanvers, Le Jardin de Talèfre, la source de l’Arveyron, le Mont Blanc. Le 10 octobre la saison ferme. Le poste de gendarmerie détaché pour Chamonix est dissous. Les hôtels ferment.
Tout est décrit dans le moindre détail dans ce guide. Cet ouvrage très instructif est incroyablement précis et enrichissant pour qui veut connaître les débuts du tourisme dans cette vallée des Alpes.
1865 marques le début d’une longue aventure touristique pour la vallée de Chamonix.
Sources : Mr Guichonnet, Revue de géographie alpine de 1944 numéro 4 . La saison touristique à Chamonix en 1865- Le bulletin, journal de l’arrondissement de Bonneville – 1865- Guide Joanne : Itinéraire de la Suisse – 1865 -A Joanne : Voyage en Suisse.