Auteur/autrice : Christine BOYMOND LASSERRE
Le premier refuge alpin de Chamonix : le temple de la nature au Montenvers
Écrit par Christine BOYMOND LASSERRE le . Publié dans Le patrimoine de Chamonix, Tous les articles du blog. Aucun commentaire sur Le premier refuge alpin de Chamonix : le temple de la nature au Montenvers
Le premier refuge alpin de Chamonix : le temple de la Nature au Montenvers
Il a vu passer Chateaubriand, les impératrices Eugénie, puis Marie Louise et aussi Victor Hugo, Charles Nodier, Lord Byron, Mary Shelley, Georges Sand, Liszt, Alexandre Dumas et tant d’autres….
Il est maintenant en bien piètre état… Notre fameux « Temple de la Nature », chanté par les romantiques du 19ème siècle.
Qu’est-il ? Un petit bâtiment de forme ovoïdale, situé au Montenvers, au-dessus du Grand Hôtel du Montenvers .
Il faut dire qu’il est là depuis 1795. Il a succédé à un petit abri offert par un anglais, Mr Blair, en 1779, pour abriter les voyageurs venus découvrir la Mer de Glace. Très vite en mauvais état, il est abandonné. Les voyageurs ont des difficultés pour s’abriter des intempéries.
Chamonix doit alors la construction du nouveau bâtiment à Mr Marc Théodore Bourrit. Mr Bourrit, chantre genevois, est amoureux fou de cette vallée. Il est le meilleur publicitaire de l’époque et est désolé de l’aspect du vieil abri. Il obtient l’appui financier nécessaire de la commune de Chamonix et du « Résident de France de Genève » pour mettre en route la construction d’un nouvel édifice.
« Le 10 floréal an III de la république, une et indivisible, vu la pétition du citoyen Bourrit… tendant à et autorisé à faire construire une maison sur le mont envers destinée à recevoir les voyageurs savants et à contenir tous les instruments de musique nécessaires pour observer les rares beautés de la nature… Ne laissent pas douter que cet établissement ne soit une bienfaisance pour la commune qui deviendra propriétaire de la bâtisse et pour les amateurs et les savants qu’elle attirera en leur présentant tout à la fois un hospice et un observatoire à près de 800 toises au dessus de la mer où est suspendu le glacier du Montenvers.
C’est le premier refuge alpin. Il comprend une pièce et un petit grenier. Il est alors dédié à la nature, d’où son nom « le Temple de la Nature ». Il sera malheureusement vite dégradé, mais aussi vite restauré par le comte de Pontencoulant, préfet d’Empire qui remet à l’aubergiste Mme Coutterand les fonds nécessaires pour les réparations.
C’est alors que le refuge connaît ses heures de gloire et que l’on y verra passer les plus grands noms de la littérature, de la peinture et des sciences. En 1817, Joseph Tournier, le premier adjudicateur du Montenvers, y ouvre une boutique de naturaliste. Il est repris en 1827 par Joseph Marie et David Couttet qui en font un cabinet d’histoire naturelle et installent un registre de voyageurs. C’est le passage obligé des voyageurs au Montenvers!
En 1840 est construit juste à côté une auberge qui deviendra un petit hôtel. Mais les visiteurs s’arrêtent encore au temple de la nature. La construction du grand hôtel du Montenvers en 1880 lui sera néfaste… Il servira de buanderie…
Très endommagé, il est sauvé en 1950 par Charles Vallot. Il fait appel au comité des Sites et Monuments historiques du Touring Club. Mr Laprade, architecte en chef des palais Nationaux, dirige les travaux. Il est joliment restauré, mais peu à peu la commune s’en désintéresse et ne se préoccupe pas de l’entretenir.
Il faudra attendre 1973 pour que l’on entreprenne des travaux de réhabilitation grâce à l’association des AMIS DU VIEUX CHAMONIX. Une équipe de guides chamoniards dirigés par les services techniques de la ville entreprennent la restauration du « Temple de la nature » et des anciennes écuries. L’association se voit confier l’entretien du bâtiment et la charge d’en faire un mini musée pour les périodes estivales.
Ce mini musée fonctionnera jusqu’à la période où le musée alpin devenant un musée d’Etat l’association ne peut plus s’occuper du « temple ».La commune l’abandonne, le Musée alpin ne s’en occupera plus.
La compagnie du mont Blanc a il y a quelques temps proposé une animation. Puis plus rien.
Depuis notre temple de la nature se détériore peu à peu…
La compagnie du mont Blanc a il y a quelques temps proposé une animation. Puis plus rien.
Depuis notre temple de la nature se détériore peu à peu…
Sources : Théodore Bourrit – Charles Vallot – Archives Amis du Vieux Chamonix
Dans le cimetière de Chamonix 2 tombes avec des skis
Écrit par Christine BOYMOND LASSERRE le . Publié dans L'histoire de Chamonix, Tous les articles du blog. Aucun commentaire sur Dans le cimetière de Chamonix 2 tombes avec des skis
Dans le cimetière nombreuses sont les tombes avec piolet , cordes rappelant l’alpinisme , activité emblématique de Chamonix. Et, bien que le ski fasse partie de la culture chamoniarde, seules deux tombes sont ornées d’une paire de skis. Ces skis recouvrent entièrement les 2 pierres tombales. Pas d’autres accessoires, afin de rappeler à tous l’importance que ces skis ont pu jouer dans la vie de ces deux « chamoniards » enterrés ici. Elles sont donc uniques.
Ces deux tombes rappellent un moment de l’histoire du ski de la vallée. Ici on retrouve le Docteur Hallberg et le beau « Muck » personnage illustre de la vallée. L’un est suédois , l’autre polonais.
En 1929 tous deux écriront en français et en commun un ouvrage intitulé « le ski par la technique moderne » qui ferra le buzz lors de son édition.
Ce livre sera réédité trois fois en français et une fois en italien avec les corrections apportées en raison de l’évolution rapide des techniques et de la pratique du ski.
Le docteur Hallberg, passionné de ski, apporte sa connaissance médicale et son regard habitué des sportifs, Muck , exceptionnel skieur, apporte sa connaissance de la montagne ,du ski en tous genre puisqu’il pratiquait aussi bien le ski que le ski de fond et le ski de saut.
Cet ouvrage illustré de plus de 200 dessins est novateur en France. Les auteurs s’arrêtent sur l’importance de l’équipement , du choix des skis, des farts, des bâtons, des fixations, de l’entraînement.
Puis ils abordent les différentes techniques de l’époque : christiania, télémark, lifted stem, ski de saut, ski en haute et moyenne montagne, ski de descente et de slalom.
Mais on y découvre aussi un très grand chapitre sur les régimes alimentaires, sur l’hygiène du sportif, sur l’importance de la préparation physique et mentale et également toute une médecine sportive qui est totalement novatrice dans ces années d’entre deux guerres. Cette partie est incroyablement moderne et d’actualité !
Le succès de cet ouvrage vient de la clarté des explications, des dessins précis et très évocateurs. D’autant qu’à cette époque les écoles des diverses techniques se querellaient bien souvent.
le docteur Hallberg écrira un autre livre en 1936 juste avant la domination de la méthode décrite par Emile Allais qui deviendra la technique adopté par toutes les écoles de ski de France .
Ces deux personnages, un peu oubliés, laissent donc à Chamonix leur empreinte sur l’évolution technique du ski. Leurs deux tombes nous le rappellent.
James Couttet : un grand homme de la vallée
Écrit par Christine BOYMOND LASSERRE le . Publié dans L'histoire de Chamonix, Tous les articles du blog. Aucun commentaire sur James Couttet : un grand homme de la vallée
Dimanche 19 novembre 2017 aux Bossons, les Chamoniards ont honoré James Couttet, un « babotch » hors du commun et sacrément attachant.
Dimanche 19 novembre 2017 aux Bossons, les Chamoniards ont hon
En 1938 il devient à l’âge de 16 ans et demi champion u monde de descente à Engelberg devant Emile Allais. Il est vainqueur du Kandahar en 1939 à Murren. L’avenir s’annonce plein d’espoir pour ce jeune sportif au talent incroyable
Mais l’arrivée de la guerre stoppe cet envol phénoménal et James, dès lors, participera aux combats dans la résistance avec ses fidèles compagnons. Dès 1945, il s’inscrit au concours du stage de guide et sort major, devant Jean Farini son complice, Lionel Terray et Marcel Burnet. C’est dire son talent et ses capacités. ll pratique son métier de guide avec passion. Il réalise avec Gaston Rébuffat la première ascension de la face nord de la dent du Géant. Mais en 1949, dans la descente de la Verte par l’arête du Moine, sa vie de guide bascule, deux de ses clients trouvent la mort. Comment se remettre d’un tel drame? Il consacre alors tout son temps au ski, à la glisse.
Passionné de glisse sans heurts, il met au point la technique du christiania léger, entraînant dans son sillage nombre de moniteurs.
Il se remet à la compétition: vainqueur du Kandahar en 1947, puis à Mürren en 1948 . La consécration arrive en 1948 aux J.O. de Saint Moritz où il obtient la médaille d’argent en slalom et celle de bronze en combiné. En 1950, il est médaillé d’argent en descente et médaillé de bronze en géant au championnat du monde d’Aspen.Il reste 18 ans en équipe de France avec 17 victoires comme champion de France! Il obtient le K de diamant pour ses 8 victoires au Kandahar
Il Son cerveau fourmille d’idées, il invente avec son bon ami l’ingénieur Denis Creissels des boucles pour chaussures de ski et un « téléscaphe », sorte de télécabine sous-marin qui fonctionne durant trois ans à Marseille Callelongue.
Il crée avec Jean Farini le télésiège des Bossons. Sa passion est entière pour ce lieu auquel il reste attaché en y créant compétitions de skis et cours particuliers. Les championnats du monde de 1962 s’y dérouleront.
Beaucoup se souviennent de cet homme agréable qui, dans son magasin au centre de Chamonix, refaisait le monde!
Passionné par sa vallée, il est conseillé municipal de1953 1970. Et chacun se souvient de son investissement personnel dans le développement de la vallée.
James Couttet est certainement une des plus belles personnalités dont Chamonix peut s’enorgueillir!
Le beau « Muck »
Écrit par Christine BOYMOND LASSERRE le . Publié dans L'histoire de Chamonix, Tous les articles du blog. Aucun commentaire sur Le beau « Muck »
Les anciens à Chamonix se souviennent encore du « Beau Muck ».
Personnage marquant de la période de l’entre deux guerres, «Muck » était de toutes les fêtes, de toutes les rencontres. Nombreux sont les chamoniards qui en parlent encore avec humour et tendresse.
Henry Mückenbrünn, surnommé « Muck », arrive à Chamonix en 1924 avec l’équipe polonaise de ski pour participer aux J.O. Les polonais disent qu’il est venu à Chamonix seulement en 1926.
A Zakopane, son pays d’origine, dans les montagnes des Tatras, il est la gloire nationale. 7 fois champion de ski, 2 fois détenteur du record de saut à ski , il est la star de l’équipe. Très apprécié de ses compatriotes, il a laissé, encore de nos jours, un souvenir ému dans son village d’origine,
Cependant il ne retournera à Zakopane qu’une seule fois : en 1933 .Là il participera en tant que juif polonais à des jeux appelés « les maccabiades » les premiers jeux hiver juifs. Ces jeux avaient été troublés par la jeunesse anti sémite polonaise. Est ce pour cette raison qu’il ne retournera plus jamais dans son pays natal ? Nul ne le sait
Excellent skieur, excellent sauteur, il se lance dans la compétition, connaissant un vif succès. Mais i l faut gagner sa vie, or on ne s’enrichit pas avec des médailles et très vite il entreprend de donner des cours.
Il co écrit avec le doctuer Hallberg un livre sur les techniques de ski, sur le matériel de ski mais aussi sur les exercices à faire pour se préparer à ce sport exigent.
Beau parleur, belle carrure, il séduit immédiatement la clientèle aisée venant à Chamonix. Il comprend tout l’intérêt de s’occuper avec attention de ces dames un peu « inaptes» sur leurs skis. Enlacées par cet homme vigoureux qui les emmène sur les pentes enneigées, elles se laissent griser par la vitesse… C’est fantastique ! D’autant que cet homme, au léger accent slave, danse la valse à merveille. Dans les salons de l’hôtel des Alpes ou du Majestic, les jeunes chamoniardes et les belles «demoiselles» rivalisent pour essayer de se retrouver dans ses bras le temps d’une danse.
Habile commerçant, il est le meilleur de l’époque, vendant, revendant ce matériel de ski toujours de plus en plus perfectionné. Ce beau skieur et ce séduisant moniteur est forcément de bon conseil… Profitant de leur naïveté, « Muck » abuse « un peu » … Mais c’est fait avec un tel charme !
Slave, c’est aussi un grand romantique … Il tombe fou amoureux de Madeleine, jeune mannequin venue présenter au col de Voza des collections de mode.
Pour elle, il devient architecte, décorateur et il construit un des plus beaux chalets des Pècles. A l’intérieur, tout est sculpté de ses mains (ou presque) : portes, meubles, placards , plafonds. Le résultat est magnifique ! Il a un talent incroyable, issu de ses racines polonaises. A Zakopane encore de nos jours le travail du bois est remarquable.
Mais la guerre arrive avec son lot de désespérances. Le beau Muck est juif polonais et fait des envieux . Dénoncé, il est arrêté par la milice, il s’enfuit et se cache dans la région d’Annecy..
Ses activités reprennent après la guerre, mais on n’est plus dans la période des années folles ! Il vend son beau chalet et trafique un peu. Le moniteur n’est plus aussi fringuant, d’autres ont pris le relais.
Il connaîtra une fin tragique en avril 1956, emmenant avec lui dans la mort une des plus belles personnalités de Chamonix, le guide Paul Demarchi.
Les divers refuges construits au sommet de l’Aiguille du Goûter.
Écrit par Christine BOYMOND LASSERRE le . Publié dans L'histoire de Chamonix, Tous les articles du blog. Aucun commentaire sur Les divers refuges construits au sommet de l’Aiguille du Goûter.
Les incroyables défis de l’homme en haute montagne !
1854 : un abri en pierres construit par Charles Loiseau. Abri surnommé « la cabane à l’oiseau ».
1858 : premier refuge pouvant abriter 4-5 personnes. Il faudra 80 ascensions de porteurs pour apporter les planches au sommet ! Restauré en 1882.
1906 : construction d’un nouveau refuge juste à côté du refuge précédent. Il peut abriter 7 personnes. Haut de 1m80. Mesure de 4.20mX3.20m.
854 abri en pierres construit par Charles Loiseau. Abri sur
1936 : sur emplacement du refuge de 1858. Construction d’un refuge de 30 places. Refuge privé. Acheté en 1942 par le CAF.
1957 – 1960 : agrandissement du refuge de 1936 en préfabriqué. Usage de l’hélicoptère pour monter le matériel. Inauguré en 1962.
1989 – 1990 : Refuge 1906 est démantelé et à sa place est construite une annexe de 40 places.
2010-2013 : construction du refuge actuel.
.
Les mulets dans la vie chamoniarde au cours du XIXème siècle
Écrit par Christine BOYMOND LASSERRE le . Publié dans L'histoire de Chamonix, Tous les articles du blog. Aucun commentaire sur Les mulets dans la vie chamoniarde au cours du XIXème siècle
Nombre de photos belles et variées nous montrent l’importance qu’ont joué les mulets dans le développement touristique de Chamonix.
Les voyageurs n’étaient pas toujours des marcheurs habitués à la montagne, aussi ce moyen de déplacement leur convenait parfaitement bien. On compte plus de 300 mulets en 1879 ! Ce n’était pas anodin car pour ces mulets il y avait une réglementation très stricte liée à celui de la compagnie des guides.
Dans le règlement de 1879 de cette compagnie, il y a une dizaine d’articles concernant les mules et mulets!
Tout d’abord, dans la première quinzaine du mois de mai, se pratiquait la revue des mulets et de leur harnais. Ceci sous le contrôle du maire, du président du conseil d’administration, du guide chef, d’un vétérinaire, d’un sellier. Si les bêtes étaient impropres au service elles étaient refusées. Et si pendant la saison une monture était signalée comme vicieuse ou inadaptée à sa fonction on procédait à une expertise spéciale.
C’est le guide chef qui les inscrivait au tour de rôle si elles étaient reconnues aptes au service. C’est encore lui qui fournissait le nombre de montures nécessaires pour chaque client. Les mulets et montures étaient sujets à un tour de rôle comme les guides. Chaque monture devait être munie d’une selle pour hommes et d’une selle pour femme, des harnais, bâts, courroies et autre objets nécessaires, le tout devant être en bon état.
Dans les passages difficiles, les voyageurs ayant plus de quatre mulets devaient avoir deux guides. Il était interdit de maltraiter les mulets sous peine de privation de tour de rôle.
Les familles n’étaient autorisées qu’à une seule monture, c’était le drame si la monture n’étais ps acceptée.
Une mule ne pouvait être inscrite que par son propriétaire.
Chaque monture portait au sabot son numéro d’ordre et était numérotée aux frais de la compagnie.
Le mulet arrivé en retard ou pas convenable harnaché perdait son tour de rôle.
Il fallait payer un droit d’inscription et les frais de visite de 4 francs.
Le prix de la course du mulet était payé au guide qui l’avait dirigé.
Ce guide devait immédiatement payer son dû au propriétaire du mulet sinon il perdait son tour de rôle. Le guide qui proposait aux voyageurs une bête non inscrite au tour de rôle prenait le risque, non seulement d’une forte amende, mais aussi de perdre son tour de rôle.
Tout guide qui avait maltraité ou laissé stationner le long des routes, devant les auberges ou ailleurs, les montures qui lui avait été confiées était passible de la perte du tour de rôle ou pire en cas de récidive.
Il était interdit à tout jeune homme de retourner les montures avant l’âge de 14 ans. Les guides qui employaient comme rantourneurs des enfants âgés de moins de 14 ans étaient passible de perte de deux tours de rôle.
Les mulets seront pendant plus de cinquante ans au cœur de la vie touristique de la vallée. Lors du projet de la construction du train du Montenvers, les chamoniards se sont fortement opposés à ce nouveau moyen de transport, voyant là une concurrence néfaste à leur activité. Les mulets connaîtront encore au début du XXème siècle une activité touristique, pour le glacier des Bossons, le Brévent, la Flègère, le glacier d’Argentière… Mais la modernité et les débuts des téléphériques marqueront la fin définitive de ce type de locomotion.
Photo commentée prise du hameau des plans (photo Auguste Couttet)
Écrit par Christine BOYMOND LASSERRE le . Publié dans Le patrimoine de Chamonix, Tous les articles du blog. Aucun commentaire sur Photo commentée prise du hameau des plans (photo Auguste Couttet)
La saison touristique à Chamonix en 1865
Écrit par Christine BOYMOND LASSERRE le . Publié dans L'histoire de Chamonix, Tous les articles du blog. Aucun commentaire sur La saison touristique à Chamonix en 1865
Ce n’est pas nouveau… Déjà en 1865, on étudiait le passage des touristes dans la vallée de Chamonix.
Ils fréquentent pourtant le prieuré de Chamonix depuis près d’un siècle.
En 1783 ils étaient 1 500 !
En 1830 on en compta 3 000.
En 1861, la vallée est française depuis un an, l’Etat se préoccupe du tourisme et édite déjà une série d’ouvrages afin de promouvoir la Savoie. De magnifiques lithographies sont éditées et on compte de plus en plus de visiteurs se présenter dans ce nouvel éden touristique qu’est la vallée de Chamonix.
1865 marque la 1ère année d’une grande fréquentation. Certes la route promise par Napoléon III n’arrive pas encore au centre de Chamonix, mais les touristes affluent très nombreux malgré l’accès difficile avec des chars à bancs !
Si de 1786 à 1860 (en 64 ans) on dénombre 115 cordées vers le Mont Blanc, on en compte 178 de 1860 à 1865 (soit en seulement 5 ans). Le mouvement est donc lancé.
En 1865 on compte 2 747 français alors qu’on reçoit 3 669 anglais, 3 004 américains, 1 097 allemands, 227 belges, 214 italiens, 173 russes (membres de famille impériale, officiers de la garde), 119 suisses, 108 hollandais, 43 espagnols, 4 turcs, 2 indiens et 382 non répertoriés.
Soit 11 789 visiteurs au pied du Mont Blanc alors que Saint Gervais ne reçoit que 320 étrangers et seulement 32 voyageurs se rendent dans la vallée du Giffre. Le nombre des visiteurs à Chamonix aura quadruplé en 35 ans. L ‘état s’en félicite et on précise que… « l’intérêt de Chamonix n’est pas seulement local , c’est un intérêt général, Chamonix est le rendez vous des touristes du monde entier et leur affluence par la facilité des communications deviendra une source inépuisable de prospérité pour notre département ! »
Les jours de pointe sont les 16 et 17 juillet, 22 et 29 août.
Cette même année, 35 alpinistes réussissent l’ascension du Mont Blanc.
La saison en 1865 débute vers la fin juin pour se clôturer début octobre.
En ces années de milieu de siècle Chamonix a déjà une grande expérience de l’accueil, les hôtels sont nombreux.
L’hôtel Royal (actuel Casino) de grande réputation, Hôtel de Londres et d’Angleterre, Hôtel de l’Union (construit en 1816. détruit en 1930), Hôtel de Saussure ou Grand Hôtel Impérial (actuel Hôtel de Ville), Hôtel de la Couronne, (actuelle résidence du Relais de poste) Hôtel du Nord, Hôtel Mont Blanc, Palais de Cristal, A la Réunion des Amis chez Simond ( il est précisé propre et prix modérés), Pension des Alpes.
Il est notifié que l’on trouve des Bains à l’hôtel Royal et à l’hôtel de Londres.
Sur le guide Joanne (ancien guide bleu) de 1865 il est précisé que : « ces hôtels, surtout les trois premiers, sont aussi bien tenus que ceux des grandes villes, mais… depuis 20 ans ils ont beaucoup élevé leurs prix. Du reste pendant les mois de juillet et août, il est souvent difficile de s’y procurer une chambre. »
A Chamonix, on trouve des cafés avec des billards, des cabinets de lecture, des magasins de diverses denrées. On informe que l’on peut admirer les plans en relief du Mont Blanc chez Michel Carrier. Et il est de bon ton de se promener en début de soirée avec ses plus belles tenues vers la passerelle située au dessus de l’Arve. La poste est ouverte tous les jours de 7h du matin à 21h ! On recommande la boutique de Venance Payot, naturaliste, pour la qualité et la variété de ce qui y est vendu. On mentionne les photographies publiées par les frères Bisson, Baldus, Soulier, Ferrier, Braun…
On évoque également le règlement de la Compagnie des guides datant de 1862 avec ses diverses particularités! On donne avec précision les tarifs des guides, des porteurs, des mulets. On recommande certains plus que d’autres ! La liste des excursions est longue : les différentes cascades, le Brévent, le Montanvers, Le Jardin de Talèfre, la source de l’Arveyron, le Mont Blanc. Le 10 octobre la saison ferme. Le poste de gendarmerie détaché pour Chamonix est dissous. Les hôtels ferment.
Tout est décrit dans le moindre détail dans ce guide. Cet ouvrage très instructif est incroyablement précis et enrichissant pour qui veut connaître les débuts du tourisme dans cette vallée des Alpes.
1865 marques le début d’une longue aventure touristique pour la vallée de Chamonix.
Sources : Mr Guichonnet, Revue de géographie alpine de 1944 numéro 4 . La saison touristique à Chamonix en 1865- Le bulletin, journal de l’arrondissement de Bonneville – 1865- Guide Joanne : Itinéraire de la Suisse – 1865 -A Joanne : Voyage en Suisse.
Pourquoi le Buet est il surnommé le « Mont Blanc des Dames »
Écrit par Christine BOYMOND LASSERRE le . Publié dans L'histoire de Chamonix, Tous les articles du blog. Aucun commentaire sur Pourquoi le Buet est il surnommé le « Mont Blanc des Dames »
Le Buet est le sommet le plus élevé de Vallorcine. Il culmine à 3040m.
Le Buet s’appelait au XVIIIème siècle « la Mortine » signifiant « terrain schisteux et délité » d’après le patois « mortena ».
1765 : première tentative d’ascension par Jean André Deluc et son frère, savants genevois.
20 septembre 1770 : ces mêmes frères Deluc atteignent les premiers le sommet du Buet, par le versant de Sixt. Ils y mènent une série d’expériences dont le calcul du temps nécessaire pour porter de l’eau à ébullition à cette altitude. Ils sont les premiers à utiliser le baromètre pour mesurer une altitude. On considère cette épopée comme la première ascension en haute montagne dans les Alpes.
1775 : première ascension depuis Vallorcine (par le vallon de Bérard) par Marc Théodore Bourrit accompagné de son guide vallorcin Pierre Bozon. Il lui fallut d’abord établir que cette montagne appelée « la Mortine » par les habitants de Vallorcine était bien ce que les habitants de Sixt appelaient « le Buet ».
1776 : Horace-Bénédict de Saussure reprend l’itinéraire de son compatriote. Il y fait des observations préalables à l’ascension du mont Blanc.
Mais pourquoi donc ce sommet est il surnommé le « Mont Blanc des Dames » ?
Beaucoup pensent qu’en raison de son altitude moins élevée que le Mont Blanc et à sa ressemblance avec celui-ci il est plus aisé d’accès pour les femmes. Explication bien accommodante. Mais est ce bien cette raison ?
Si à Chamonix on se glorifie, avec raison, en 1786 de la réussite de la première ascension du Mont Blanc, on a occulté une première féminine réalisée durant ce même mois d’août 1786.
Effectivement trois jeunes femmes anglaises (19, 30 et 36 ans ) originaires du Devonshire gravissaient le Buet accompagnées de Jean Pierre Béranger et du guide Jean Baptiste Lombard. Elles deviennent les premières femmes à gravir un sommet de plus de 3000m.
Elles s’appellent Jane, Mary, Elsabeth Parminter
Cette information a été rapidement oubliée.
On retrouve trace de cette ascension dans une lettre écrite par Th. Bourrit «… trois dames anglaises du nom de Parminter, sont aussi montées sur le glacier du Buet, conduites par M. Bérenger et le guide nommé Grand Jorasse. Elles ont eu quatre heures de neige à parcourir avant d’atteindre le sommet… ». (lettre du 20 septembre 1786)
Hans Ottokar Reichard dans le guide suisse de 1793 raconte à propos du Buet … « pendant que j’étais à Chamonix trois anglaises du nombre desquelles étaient Miss Parminter firent cette ascension… »
De même dans la revue de l’Alpine Club de 1957 Gavin de Beere fait connaître aux alpinistes britanniques le nom des femmes dont parle Bourrit. « …en août 1786 le Buet était tenté par Mlles Jane, Elisabeth et Mary Parminter originaires du Devonshire ». « …Mr Berenger et deux dames y sont parvenus ». précise Gavin de Beere. Il est probable que deux de ces demoiselles, Jane et Mary, sont allées au sommet, la troisième étant handicapée… « Elle n’a pu se résoudre à mettre le pied sur la neige » et aurait attendu ses compagnes plus bas. Il sera d’ailleurs un temps appelé le Parminter Peak. In « 1786 Jane, Elizabeth Mary Parminter climbed Mont Buet of 3096 metres in the Alps. The three Parminter ladies are now recognised as the first women to reach any alpine summit over 3000 metres”.
Hélas, nous n’avons pas de récit écrit par ces fameuses miss anglaises. Nous savons par la famille qu’elles s’embarquent d’Angleterre le 23 juin 1784 pour plusieurs années afin de réaliser le fameux « Grand Tour », qu’elles ont beaucoup arpenté les montagnes voisines du Valais, qu’elles sont deux sœurs, Jane et Elisabeth et qu’elles ont en charge leur cousine orpheline Mary. Elisabeth est handicapée et d’ailleurs mourra très jeune.
Ce qui est intéressant à noter c’est que les hommes n’étaient pas les seuls anglais à entreprendre ce Grand Tour, mais qu’en 1784, trois jeunes femmes fortunées, se sont également lancées dans cette aventure.
Ce fut donc probablement la raison pour laquelle le Buet est appelé le « Mont Blanc des Dames » car il a été gravi pour la première fois par des femmes, la même année que la première ascension du mont Blanc.
On leur doit bien cet honneur !
Sources /Marc Théodore Bourrit, Hans Ottokar Reichard , revue Alpine Club
Photos prises du belvédère au dessus du Chapeau – une en 1880, l’autre en 2017
Écrit par Christine BOYMOND LASSERRE le . Publié dans L'histoire de Chamonix, Tous les articles du blog. Aucun commentaire sur Photos prises du belvédère au dessus du Chapeau – une en 1880, l’autre en 2017
Le clocher de l’église Saint Pierre d’Argentière n’est il pas le plus beau de la vallée ?
Écrit par Christine BOYMOND LASSERRE le . Publié dans Le patrimoine de Chamonix, Tous les articles du blog. Aucun commentaire sur Le clocher de l’église Saint Pierre d’Argentière n’est il pas le plus beau de la vallée ?
Les Argentérauds l’affirment : oui, il est le plus beau !
A la vue des anciennes lithographies ou tableaux, le clocher n’a pas la forme connue de nos jours. Comme pour les églises de l’ancien duché de Savoie, le clocher est relativement simple, une flèche s’élançant vers le ciel, à l’image des églises savoyardes.
En fait, le clocher d’Argentière subit ce que tous les clochers savoyards vont connaître durant la période révolutionnaire. Le gouverneur Antoine Albitte, envoyé pour établir le gouvernement révolutionnaire en 1793, ordonne que « toutes les maisons des villages soient à même hauteur y compris les anciens bâtiments de culte ». Ce Robespierre savoyard fera raser tous les clochers de Savoie en 1794 : 800 clochers détruits, 1600 cloches fondues !
Mais voilà, le temps passe, et dès 1815, sous la restauration du régime sarde, les églises peu à peu sont reconstruites. Les Houches, Chamonix, Argentière entament les travaux de reconstruction de leur clocher. En 1815 on voit les autorités locales s’inquiéter de l’état du clocher d’Argentière et décider de vendre des terrains afin de financer les travaux de sa restauration. Il faudra attendre 1845 pour voir enfin les travaux achevés.
A l’époque, l’ensemble des clochers de la vallée sont reconstruits selon un modèle dit « clocher à bulbe ». Pourquoi ? Peut être les artisans se sont ils inspirés des clochers à bulbes de certaines anciennes églises savoyardes réalisés dans d’autre communes.
Il est notoire que c’est d’au-delà des Alpes leur sont parvenus le dôme et le lanternon, soit de Franche Comté, soit des pays germaniques ou encore d’Italie. Les artisans savoyards émigrants ont su s’inspirer des idées créées ailleurs ; Il les ont adaptés . Celui d’Argentière est le plus sophistiqué, le plus élégant de la vallée.
A sa base, on voit une première partie octogonale surmontée d’un lanternon ceint d’une galerie, il y a ensuite un premier dôme, un second lanternon et un second dôme et finalement une flèche.
Sa beauté est incontestable, on remarquera son parfait équilibre.
A l’époque de sa réalisation, le clocher avait été recouvert d’écailles de fer blanc, une tôle d’acier recouverte d’étain. Ce fer blanc avait la particularité de rouiller ce qui donnait au clocher une couleur dorée très chère aux Argentérauds. Cette couleur était produite par un processus intéressant. En fait, les conditions d’étamage de l’époque n’étant pas parfaites, l’eau réussissait à traverser l’étain jusqu’au fer donnant à notre clocher cette couleur si chaude.
Ce clocher magnifique semble en effet être « doré ». Grand nombre de visiteurs l’admirant s’imaginent qu’il est recouvert de petites tuiles de bois. L’illusion est parfaite !
Lors de la restauration de 1986, le curé Eyrehalde tenait avant tout à retrouver cette couleur. Mais les techniques modernes de fer étamé ne permettaient plus d’obtenir le même résultat .Les Argentérauds partirent alors à la recherche d’un artisan travaillant « à l’ancienne ». C’est finalement en Angleterre que l’on trouva un professionnel capable de fabriquer ces tuiles si particulières.
Et c’est grâce à Gérard et Thierry, Compagnons du Tour de France, après des milliers d’heures de travail acharné pour la pose des tuiles, que le clocher retrouva son aspect si original.
Il fut inauguré le dimanche 24 janvier 1986. Ce clocher magnifique semble en effet être « doré ». Grand nombre de visiteurs l’admirant s’imaginent qu’il est recouvert de petites tuiles de bois. L’illusion est parfaite .
Histoire et patrimoine de la vallée de Chamonix
Le centre de Chamonix en 1890 et en 2017
Écrit par Christine BOYMOND LASSERRE le . Publié dans Le patrimoine de Chamonix, Tous les articles du blog. Aucun commentaire sur Le centre de Chamonix en 1890 et en 2017
Les Bouchards : connaissez vous ce hameau hors du temps ?
Écrit par Christine BOYMOND LASSERRE le . Publié dans Le patrimoine de Chamonix, Tous les articles du blog. Aucun commentaire sur Les Bouchards : connaissez vous ce hameau hors du temps ?
Au delà des Houches, dans ce petit vallon caché de Vaudagne sur le chemin vers le mont Borrel se niche un hameau des plus magnifiques.
Ici le temps est suspendu. Quelques maisons, entourées de greniers et remises, un four à pain. Pas de clôtures. Il y a les Bouchards d’en haut, avec trois maisons, les Bouchards d’en bas avec cinq maisons. En patois on dit les Bouchards d’ava et les Bouchards d’amon.
On apprécie ce milieu préservé, authentique. Certaines de ces anciennes fermes ont été restaurées, sans ostentation, dans le respect de l’architecture originelle. La plupart datent de la fin du 18ème, début du 19ème. Sur la mappe sarde on en comptait un plus grand nombre.
Ces fermes sont édifiées selon le même plan, comme toutes celles de notre vallée. Leurs bases sont construites avec les pierres des torrents, jointoyées à la chaux puis crépies également à la chaux. Ce rez-de-chaussée abritait à la fois les hommes, à l’aval du bâtiment vers le soleil. et les animaux à l’amont (vaches- chèvres-cochon, parfois un mulet).Le long des façades, sur le pignon avant, courent des galeries où l’on faisait sécher le linge et aussi les petites récoltes comme les oignons ou les prunes produites dans les champs du côté de Servoz -Passy. De même pour le chanvre ou le lin qui étaient suspendus à de longues perches accrochées au pignon.
Pour accéder à l’intérieur on emprunte une sorte de « sas » appelé le « devant de l’Outa ». Celui-ci donne sur deux portes. L’une ouvre sur un un couloir appelé « puech » par lequel on accédait au logement familial, d’abord à la cuisine appelée outa. Outa lieu de la « bourne » immense cheminée traversant la totalité de la maison. A l’intérieur on y fumait les salaisons, provisions indispensable pour la survie de toute la famille.
De là on accédait au pèle, pièce chauffée par un poêle, le lieu de vie de la famille. Parfois trouve t-on une chambre supplémentaire pour les parents.
Du « devant de l’outa » une autre porte donne accès à l’écurie où se tenaient les bêtes le temps des longues périodes d’hivernage.
Au sous-sol se trouvait la cave. Y étaient entreposés les fromages fabriqués par la famille, les salaisons fumées ou salées sur place, les réserves de « tartiffles » (pommes de terre) ou fruits produits dans les environs.
La partie supérieure abrite la grange à foin. Une charpente dite « à colonnes » s’appuye sur la maçonnerie du bas. Les parois sont formées par un mantelage de planches horizontales non jointes afin d’aérer l’ensemble. Adossée à l’amont, est aménagé un accès de plain pied. On stockait « les trosses » de foin, afin de nourrir les bêtes durant les longs mois d’hiver.
Chacune des ses fermes possède un, voire deux greniers. Un four a été restauré.
Ici on est en paix. Respectons ce lieu magnifique…
Merci à Yves Borrel pour sa collaboration
Histoire et patrimoine de la vallée de Chamonix
Christine Boymond Lasserre
Ces petites maisons typiquement chamoniardes qui se transforment !
Écrit par Christine BOYMOND LASSERRE le . Publié dans Le patrimoine de Chamonix, Tous les articles du blog. Aucun commentaire sur Ces petites maisons typiquement chamoniardes qui se transforment !
A Chamonix, qu’est-ce que le Pont de Cour ?
Écrit par Christine BOYMOND LASSERRE le . Publié dans L'histoire de Chamonix, Tous les articles du blog. Aucun commentaire sur A Chamonix, qu’est-ce que le Pont de Cour ?
Traverser l’Arve autrefois a été une problématique majeure pour nos anciens. Avant d’accéder dans la vallée de Chamonix on franchissait le torrent à Servoz par le fameux pont Pélissier, régulièrement emporté par des eaux dévastatrices, puis le chemin restait sur la rive gauche. Avant d’arriver au bourg de Chamonix on retraversait l’Arve aux Bossons par le pont de Pierralotaz.
Au cœur de Chamonix, il existait un seul et unique passage pour passer sur l’autre rive : le fameux pont de Cour.
Aujourd’hui, nous avons un grand et large pont de pierres situé entre la poste et le bar de la Terrasse. Ce lieu s’appelle, depuis le Moyen Age, le Pont de Cour.
On le trouve parfois orthographié Cour, Court ou encore Couz.
Court ou Cour provient du bas latin curtis, c’est-à-dire « cour de ferme » ou « enclos comprenant maison et jardin, tenure ». Ce qui serait assez logique puisque les prieurs possédaient en bordure d’Arve une grange, deux moulins, un battoir, justifiant ainsi le nom de notre pont. Mais alors pourquoi dans certains documents trouve-t-on parfois Couz? Couz dans les Alpes signifie un col. Ici ? Un col ? Peut être un lieu ou les berges se resserrent? En tous cas certainement un lieu où il était relativement aisé de traverser grâce à une passerelle. En 1435, à la lecture des actes signés entre les prieurs et les communiers, on apprend que les riverains ont l’obligation d’entretenir les routes et les ponts, mais on ne relève rien de précis concernant notre pont au cœur de Chamonix.
Ce Pont de Cour fut en 1635 l’objet d’une transaction entre la communauté de Chamonix et le chapitre de la collégiale de Sallanches. Il est précisé que « la communauté de Chamonix sera tenue à perpétuité de rendre accessible le Pont de Cour avec une largeur suffisante pour y passer les chariots, à la charge néanmoins que les seigneurs du Chapitre seront tenus de faire le port de tout le bois et qu’ils seront tenus de le couper dans la dimerie de l’église du lieu »
Ainsi, un seul pont de bois donnait accès à la rive gauche, régulièrement emporté par les débordements de l’Arve. Cette petite passerelle n’était pas plus large d’un mètre. Mais toujours elle fut reconstruite au même endroit. Paul Payot, dans son livre « Au royaume du Mont Blanc », nous apprend que le 18 septembre 1801 le pont de Cour est tombé avec sept vaches appartenant au frère Désailloud… Les vaches n’ont pas eu de mal, heureusement !
L’Arve, rivière indisciplinée au cours changeant, avait pour habitude de déborder de ses berges, pour preuve certaines photos du 19ème siècle qui nous montrent l’Arve et l’Arveyron, ainsi que les torrents de Blaitière, s’étalant largement au-delà de leurs rives gauches.
Il faudra attendre les années 1840, sous le régime du royaume de Piémont Sardaigne, pour que certains travaux d’endiguement soient engagés. C’est d’ailleurs durant cette période que l’on voit la construction en encorbellement de l’hôtel d’Angleterre ou de la pension de la Terrasse. Les travaux de canalisation reprendront sous le régime français dans les années 1870-1880.
Il est instructif de regarder les diverses vues, tableaux, lithographies représentant ce pont de bois. Tout d’abord passerelle étroite peu engageante, on la voit se transformer, devenir de plus en plus large. Le pont sera refait à neuf en 1832, puis construit en pierre en 1880, et encore élargi à son emprise actuelle dans les années 1970.
Le pont sera refait à neuf en 1832, puis construit en pierre en 1880, et encore élargi à son emprise actuelle dans les années 197
Vidéo prise d’un drone du sommet de la statue du Christ Roi des Houches
Écrit par Christine BOYMOND LASSERRE le . Publié dans Le patrimoine de Chamonix, Tous les articles du blog. Aucun commentaire sur Vidéo prise d’un drone du sommet de la statue du Christ Roi des Houches
Histoire et patrimoine de la Vallée de Chamonix
Christine Boymond lasserre
Sur la commune des Houches une statue monumentale : le Christ Roi
Écrit par Christine BOYMOND LASSERRE le . Publié dans Le patrimoine de Chamonix, Tous les articles du blog. Aucun commentaire sur Sur la commune des Houches une statue monumentale : le Christ Roi
A 1265m d’altitude, on la distingue à peine dans le paysage, perdue qu’elle est dans l’immensité de la montagne. Il faut être à son pied pour prendre la mesure de cette statue monumentale. Elle mesure 25mètres de haut, pèse 500 tonnes. Imposante, campée sur un éperon rocheux de 50m, elle domine de 200m le fond de la vallée face au Mont-Blanc. A l’époque on devait la voire de très loin, la forêt n’était pas aussi dense qu’actuellement.
Mais quel est donc l’histoire de cette statue inaugurée en 1933 ? Pourquoi à cet endroit dans la vallée de Chamonix une statue du Christ Roi .
C’est un abbé, l’abbé Claude Marie Delassiat, curé des Houches en 1926, qui rêve de rendre hommage au pape Pie XI mieux connu, dans la vallée, sous le nom d’Achille Ratti. Il avait gravi le Mont Blanc côté italien en 1890, il avait logé aux Houches. Devenu pape, il avait proclamé, dans une encyclique, la royauté universelle du Christ c’est-à-dire la primauté du Christ Roi sur l’homme alors que monte en Europe la vague des dictatures. Cette statue veut symboliser l’amour et la paix entre les hommes. Projet soutenu non seulement par l’évêque, le Vatican et les instances politiques mais aussi par les habitants de la vallée. L’abbé lance une souscription. En 3 ans il récolte la somme nécessaire pour la réalisation de son projet.
On fait appel à un sculpteur parisien, George Serraz , spécialiste de l’art religieux. L’architecte Viggo Féveile, installé à Chamonix, supervise l’ensemble des travaux. Ce sera donc une statue monumentale en béton, matériau devenu à la mode depuis l’après guerre. On imagine les difficultés rencontrées pour la réalisation des travaux dans ce lieu qui n’était desservi par aucune route carrossable. La base de la statue sera composée de blocs de béton coupés en tranches, puis assemblées sur place. Le buste, les bras, la tête sont réalisés tout d’abord en terre. De ces réalisations on en ferra des moules en plâtre. Le béton sera alors coulé dans ces moules. Quelques détails seront travaillés directement sur le béton frais.
Le socle de ce monument abrite une chapelle avec deux autels où deux prêtres pouvaient officier en même temps. Elle et est décorée de diverses statues dont un buste du pape Pie XI et d’une statue de « Marie reine du monde ». Un escalier tournant de 84 marches à l’intérieur permet d’accéder à une plateforme dissimulée derrière la couronne. On dit même qu’un passage existe le long du bras qui bénit !
Cette statue est non seulement typique de l’art religieux de l‘époque dans un contexte international de gigantisme mais elle est par ailleurs une émanation explicite de l’art décoratif. Cette expression artistique de l’entre deux guerre se révèle ici dans cette statue monumentale. L’ « art déco » est l’art du modernisme. Tout d’abord on utilise les nouveaux matériaux, ici ce sera le béton. Puis « l’art déco » est l’art de la géométrie, de la symétrie, en rupture avec « l’art nouveau » qui est l’art des circonvolutions. La statue du Christ Roi est représentative de cette vision moderne.
Grâce aux drones on peut aujourd’hui mieux apprécier cette statue emblématique quelque fois moquée pour sa silhouette massive.
Son intérêt historique mérite qu’on l’apprécie.
Autres statues monumentales de Christ Roi :
Brésil à Rio : statue de 25m de haut sur un piédestal de 85m – 1931
Portugal à Almada Lisbonne : 28m de haut sur un portique de 82m – 1949-59
Suisse dans le Valais à Lens: statue de 15m su socle de 15m – 1935
Pologne à Świebodzin : statue de 33 m de haut – 2010
Sources : Gilbert Gardes Histoire monumentale des deux Savoies – Revue de l’illustration 1934- Yves Borrel document écrit pour la commune des Houches – Paul Guichonnet : Encyclopédie savoyarde
Qu’est devenu l’ancien kiosque du PLM de Chamonix
Écrit par Christine BOYMOND LASSERRE le . Publié dans Le patrimoine de Chamonix, Tous les articles du blog. Aucun commentaire sur Qu’est devenu l’ancien kiosque du PLM de Chamonix
Un des plus charmants hôtels de notre vallée : l’Hôtel de la Prairie au village des Bois
Écrit par Christine BOYMOND LASSERRE le . Publié dans Le patrimoine de Chamonix, Tous les articles du blog. Aucun commentaire sur Un des plus charmants hôtels de notre vallée : l’Hôtel de la Prairie au village des Bois
L’hôtel le plus charmant de notre vallée : l’Hôtel de la Prairie au village des Bois
Il
Il évoque une petite maison du bonheur, une exception dans cette vallée où profit jongle avec urbanisation. On est sous le charme de cet hôtel construit au cœur des champs face au Mon Blanc. On admire sa façade ancienne et traditionnelle, on aime sa tonnelle luxuriante et ses nappes à carreaux… Ici on ressent ce sentiment d’un passé suranné qu’évoque ce lieu hors du temps.
Ici, Henri Claret Tournier construit entre 1900 et 1905 un petit hôtel sur une jolie parcelle de terre appelée « les Carrés », dont il a hérité tandis que son frère recevait la ferme familiale proche.
Les habitants du village participent à la construction, les graniteurs de la carrière voisine réalisent tous les encadrements en granit des fenêtres et portes de l’hôtel. Henri avait compris que la poussière et l’agitation du centre de Chamonix pouvaient faire fuir des clients qui seraient alors à la recherche d’un lieu verdoyant et tranquille. Pari gagné. L’hôtel n’ouvrira que l’été, mais ne désemplira pas de saison en saison d’été. C’est bien chez Henri que les clients citadins viendront se reposer et profiter du calme absolu de ce village authentique. A l’arrière de la maison, selon la tradition, il y eut longtemps une écurie qui permettait ainsi de fournir la clientèle en lait frais. De même un potager jouxtait l’hôtel. Du bio avant l’heure… Henri était guide. Il sera guide chef en 1920, et aussi conseiller municipal pour la commune de Chamonix. Avec ses clients qui logeaient chez lui il parcourra la montagne, les emmenant partout dans le massif. Il ira entre autres 99 fois au sommet du Mont Blanc, le plus souvent avec eux. Belle performance! Henri avait pour épouse Aline, une Charlet venue d’Argentière. C’est elle qui tiendra l’hôtel lorsque son mari de guide partait en montagne. C’est elle qui saura recevoir cette clientèle citadine. L’hôtel ne désemplissait pas de tout l’été. La clientèle anglaise prenait plaisir à passer un mois ou deux ici au village des Bois, loin des fumées londoniennes.
Perlina, la fille adorée d’Henri , prendra la succession. D’une main de maître elle tiendra l’hôtel jusque dans les années 1950. C’est à cette époque que Jean Louis Barrault et Madeleine Renaud résideront à la chambre n°16 face au Mont Blanc, dans cette pension au cachet si rare .Ce petit hôtel se transforme doucement. Il était difficile pour les héritiers de moderniser un hôtel datant des années 1900. Cependant, contrairement à beaucoup d’autres hôtels de la vallée qui changeront de mains, il restera la propriété de la famille. En 1950 Jean et Louisette font de cet hôtel une pension de famille chaleureuse et appréciée de tous, connue entre autre pour son excellente cuisine .On gardera jusqu’en 1990 la veille tradition chamoniarde d’appeler les clients pour les repas à l’aide d’une cloche… C’est dire à quel point cet hôtel était apprécié à sa juste valeur pour l’authenticité de ses habitudes.
De nos jours il est tenu par l fille de Geneviève, arrière petite fille de Perlina. Elle entretient avec bonheur la tradition familiale, elle modernise peu à peu les lieux, leur conservant ce charme d’une autre époque.
On ne peut que souhaiter que cet hôtel à l’attrait si indéfinissable puisse rester encore longtemps au milieu des prés méritant son nom de « la Prairie ».
On lui souhait longue vie…
Sources : archives familiales famille Lochet – Claret Tournier